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Cégep de Sorel-Tracy
Dévoilement du Prix Gabrielle-Major, 3e édition
Plusieurs personnes se sont réunies aujourd’hui, lors du dévoilement de la 3e édition du Prix Gabrielle-Major. Ce concours collégial, créé en l’honneur de Gabrielle, ex-étudiante tragiquement décédée en 2020, vise à récompenser le talent littéraire.
Initialement réservée à la population étudiante du Cégep de Sorel-Tracy, la 3e édition s’est agrandie en accueillant deux autres cégeps participants, soit le Collège Laflèche de Trois- Rivières et le Collège Brébeuf de Montréal. Chaque établissement devait, via leur propre jury, identifier les 5 meilleurs textes. Au total, ce sont donc 15 textes qui ont été analysés par les membres du jury provincial.
Denis Cossette, président du CA de la Fondation du Cégep, Raphaëlle Guilbault, attachée politique du député de Richelieu Jean-Bernard Émond, Myriam Arpin, directrice de la Fondation du Cégep, Louis Plamondon, député de Bécancour-Nicolet-Saurel, Marie-Pierre Genest, enseignante en Arts, médias et société, Vincent Deguise, préfet de la MRC Pierre-De Saurel et Maire de St-Joseph-de- Sorel, Patrick Péloquin, Maire de Sorel-Tracy, Diane Dumas, directrice générale et des affaires corporatives du Cégep de Sorel-Tracy.
Rangée avant de gauche à droite : Talissa Gagnon et Léanne Thibodeau.
À l’issue de cette sélection, le jury a choisi de décerner le Prix de la 3e édition Gabrielle-Major à la nouvelle Rêver de dormir de Léanne Thibodeau. L’étudiante en Arts, médias et société s’est notamment démarquée pour sa force narrative et l’impact qu’elle provoque.
« Ce récit de crises nocturnes récurrentes explore le thème de la souffrance existentielle à travers des propos où la terreur, la culpabilité et le sentiment d’impuissance du personnage principal sont décrits avec authenticité, nous plongeant dans l’univers chaotique de son adolescence et de sa marginalité. Le style cru et direct amplifie cette immersion, exprimant la brutalité des nuits sans repos et la fragilité d’une jeune fille prisonnière de ses démons », pouvait-on lire dans un extrait tiré des commentaires du jury.
Ainsi, Léanne, gagnante au volet provincial, recevra une bourse de 400 $ et la gagnante au volet local, Talissa Gagnon, également étudiante en Arts, médias et société remportera quant à elle, une bourse de 100 $ pour son texte Soldat de fer, soldat de chair. Les bourses sont gracieusement offertes par la Fondation du Cégep de Sorel-Tracy, fidèle partenaire de l’événement.
« J’aime penser que ce concours représente ce que les cégeps permettent et provoquent chez les étudiant.es, soit l’engagement et la détermination. Ces valeurs d’engagement et de détermination portées par le prénom et le nom Gabrielle Major rayonneront dans le Bas- Richelieu, via notre Cégep, en Mauricie via le Collège Laflèche et en région métropolitaine via le Collège Brébeuf et cela m’enthousiasme au plus haut point », souligne Diane Dumas, directrice générale et des affaires corporatives du Cégep de Sorel-Tracy.
Le Cégep de Sorel-Tracy tient à féliciter Léanne, ainsi que tous les participant.es.
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Source : Cégep de Sorel-Tracy
Pour renseignement : Mélanie Lavallée
Conseillère en communication - Service des communications melanie.lavallee@cegepst.qc.ca
Crédit photo : Karelle Farley Bas de vignette photo de groupe
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La grande gagnante de la 3e édition du PGM est Léanne Thibodeau, étudiante en Arts, lettres et communication au Cégep de Sorel-Tracy.
Rêver de dormir
Chaque nuit, c’est comme si quelque chose en moi se brisait. Pas un son dans la maison, juste le silence pesant qui enveloppe tout. Je ferme les yeux, mais au fond, j’sais que le sommeil va pas m’amener le repos. C’est là que ça commence, cette colère qui me prend. Une rage qui brûle, qui me serre la poitrine à m’en couper le souffle. Elle grandit, chaque nuit plus forte, comme une bête qui s’éveille en dedans de moi. J’peux rien faire pour l’arrêter. Mon cœur bat comme un marteau, pis j’ai l’impression que ça va me faire éclater.
Pis, j’sais pas comment, mais ça m’emporte. C’est là que ça part. Mon corps se met à bouger tout seul. Mes mains frappent, mes ongles déchirent, c’est plus fort que moi. J’ai envie de tout casser, de tout détruire, comme si c’était la seule façon de calmer cette tempête en moi. Chaque nuit, je sens la violence qui se développe, qui prend toute la place, pis moi j’peux juste me laisser faire. Ça me terrifie. Pis pourtant, j’y retourne encore, comme si c’était devenu ma seule réalité.
Avec le temps, c’est pu juste des gestes, c’est un manège malsain qui s’installe, un cycle qui finit jamais. Les murs de ma chambre y portent encore les traces de ma dernière crise, comme si eux aussi étaient pris dans cette boucle. Chaque nuit, j’suis coincée là-dedans, à tourner en rond dans ma propre folie, avec la rage qui monte, qui me prend, qui m’use. Les nuits passent, toutes pareilles, pis la violence, elle est là, elle attend, prête à surgir dès que j’ouvre les yeux.
Alors, comme chaque soir, j’prends mes pilules. Dr. Chaput dit que celles-là, elles vont vraiment m’aider à dormir cette fois. Elles sont si fortes que des fois, j’ai l’impression que je pourrais jamais me réveiller. Ça me fait peur parce que j’ai l’image de moi qui sombre dans le noir pour toujours. Mais j’ai pas vraiment le choix, alors je les prends pareil. Pis, comme toujours, à 4 h du matin, j’me réveille d’un coup, en sueur. Mon cœur bat si fort que j’ai l’impression qu’il va sortir de ma poitrine.
J’ouvre les yeux, pis la première chose que je vois, c’est mes parents. Ils sont toujours prêts, comme s’ils attendaient que ça arrive. Ils sont habillés dans leurs drôles d’armures, leur habit de protection, qu’ils disent. Ça me fait un peu rire, parce que ça donne l’impression qu’ils vont aller à un bataillon au beau milieu de la nuit. Mais je sais bien pourquoi ils les mettent : c’est à cause de moi. Ils ont peur de moi.
Mes parents… eux qui doivent vivre avec ma maladie depuis si longtemps, ils sont tellement fatigués. Ça se voit dans leurs visages. Ils dorment jamais vraiment, toujours en train de me surveiller, d’attendre que ça arrive encore. J’sais qu’ils aimeraient que tout ça
disparaisse, qu’ils retrouvent leur vie d’avant, mais ils disent rien. Ils restent là, à espérer que ça va finir par passer. Mais moi, j’crois plus à ça.
La première fois que ça m’est arrivé, c’était le 4 septembre 2013. Je m’en souviens pas, mais mes parents me l’ont souvent raconté. J’avais juste quatre ans et demi. Cette nuit-là, ils m’ont retrouvée en train de frapper ma tête contre le mur de ma chambre, encore et encore, tout en hurlant. Ils m’ont emmenée à l’hôpital, pis les docteurs ont dit que c’étaient juste des terreurs nocturnes, que ça arrive souvent aux jeunes enfants. Ils ont dit que ça passerait vite. Que tout allait rentrer dans l’ordre.
Mais aujourd’hui, j’suis rendue à 15 ans, pis rien a changé. Je sais que j’leur fais mal, mais cette rage, elle est plus forte que moi. Pis, chaque nuit, j’ai juste envie de tout finir, de trouver le silence. Ce soir, c’est comme si le noir m’appelait plus fort. J’ai pris toutes mes pilules, cette fois. Peut-être que là, j’me réveillerai pas, que j’serai enfin en paix. Mais le noir, lui, me rejette. À 4 h du matin, encore une fois, j’me réveille. En sueur, le cœur qui bat comme une bombe, pis mes parents, encore là, figés dans leurs armures de fortune. On est tous coincés ensemble, pris dans ce cercle infernal qui ne finira jamais. Quand est-ce que je vais me réveiller de ce cauchemar qu’est ma vie ?
Léanne Thibodeau
Étudiante en Arts, lettres et communication
Cégep de Sorel-Tracy