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Lauréats du nouveau prix Acfas Collaboration interordre — collégial et universitaire,
L’union fait le laser
Par Malik Cocherel
Collaboration spéciale
Le Devoir
Lauréats du nouveau prix Acfas Collaboration interordre — collégial et universitaire, Michel Olivier et Réal Vallée ont combiné leur expertise en optique-photonique pour développer un laser à fibre optique émettant des impulsions ultrabrèves dans la région visible du spectre électromagnétique. Une grande première qui ouvre la voie à d’importantes retombées technologiques et biomédicales.
Les deux experts en technologies de la lumière n’ont pas attendu de se retrouver autour d’un laser, sous les néons d’un laboratoire de recherche, pour unir leurs forces. « Nous nous sommes rencontrés en jouant au hockey dans la même équipe, à l’époque où j’étais jeune professeur et lui, étudiant diplômé. Alors, on est habitués à se passer la rondelle, » dit en plaisantant Réal Vallée, professeur au Département de physique, de génie physique et d’optique de l’Université Laval. « Il était un des vétérans de l’équipe et moi un jeune débutant. Depuis, on a gardé une excellente relation », ajoute Michel Olivier, professeur de physique au Cégep Garneau, de Québec.
Cette entente de longue date a abouti à l’une des percées scientifiques les plus remarquables de ces dernières années en optique-photonique. Réunis au sein du Centre d’optique, photonique et lasers (COPL) de l’Université Laval, les deux professeurs ont mis au point le premier laser à fibre optique capable de produire des impulsions femtoseconde, soit 10-15 seconde, dans le spectre visible. « Nous pensions que c’était impossible. Mais nous avons conçu l’expérience et acquis les équipements adéquats. Et en quelques semaines, la démonstration était réalisée. Ce qui est assez rare. En général, c’est l’inverse qui se produit : les expériences ne correspondent pas aux simulations », explique Réal Vallée.
Une impulsion créatrice
Après avoir obtenu son baccalauréat en physique à l’Université Laval, le natif de Québec a poursuivi des études postdoctorales à l’Université de Rochester, aux États-Unis. Son superviseur de l’époque, Gérard Mourou, a été récompensé par le prix Nobel de physique pour sa carrière consacrée aux lasers. À son retour au pays, en 1995, Réal Vallée est devenu professeur à l’Université Laval où il a joué un rôle clé dans la création du COPL, qu’il a dirigé de 2000 à 2020. « L’optique a toujours été une force de l’Université Laval », souligne l’expert, titulaire depuis 2010 de la Chaire de recherche industrielle du CRSNG sur les composants et dispositifs photoniques photo-inscrits au laser femtoseconde.
En s’associant à Michel Olivier, Réal Vallée s’est lancé le défi de concevoir un laser à source visible fonctionnant en régime impulsionnel ultrarapide plutôt qu’en régime continu. « Au lieu d’avoir un signal constant émis par le laser, nous concentrons l’énergie en petits paquets. Ces impulsions ont des durées extrêmement courtes, de l’ordre du millionième de milliardième de seconde. En regroupant l’énergie sur une période aussi brève, nous atteignons des puissances de crête beaucoup plus élevées », synthétise Michel Olivier, qui s’est spécialisé dans les lasers à fibre ultrarapides, à l’issue d’une maîtrise en astrophysique et d’un doctorat en physique-optique de l’Université Laval.
Un secteur de pointe à fort potentiel
Salué par leurs pairs, l’exploit réalisé par les professeurs Vallée et Olivier, en collaboration avec Marie-Pier Lord et Martin Bernier du COPL, ouvre la voie à de nombreuses applications concrètes, en particulier en biomédecine. Les lasers à impulsions ultrabrèves pourraient s’avérer précieux pour des interventions telles que la chirurgie des os ou des yeux, en permettant de cibler des tissus spécifiques tout en minimisant les dommages aux tissus environnants. « Tout reste encore à faire, mais on pense que cette source a un potentiel d’application important dans ce domaine », souligne Réal Vallée. Celui-ci s’est toujours attaché à rendre les avancées scientifiques bénéfiques pour la société.