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Consortium Formation Énergie

La transition énergétique, un défi collectif de formation

Difficile de s’y retrouver dans l’écosystème de la transition énergétique. Ça se passe à quel endroit ? En quoi ça consiste ? Naturellement, la batterie est en vedette. Mais la décarbonation industrielle et portuaire, l’hydrogène vert et l’électrification des transports sont aussi à l’ordre du jour. Bref, comment avons-nous réussi à rallier 47 organisations autour de la formation liée à cet enjeu ? Pourquoi un Consortium Formation Énergie ?

Par Thérèse Lafleur, rédactrice

Les réseaux d’enseignement professionnel, collégial et universitaire sont de la partie pour que le Québec exerce son leadership en matière d’énergies propres et de technologies durables. Et quand il s’agit de transition énergétique,  les annonces se multiplient, parfois en grande pompe – pensons notamment à Northvolt en Montérégie. C’est alors qu’entrent en jeu la Vallée de la transition énergétique,  le Consortium Formation Énergie MCQ et l’École de la batterie, pour ne nommer que ces initiatives.

Pour s’y retrouver, allons-y de manière chronologique, comme le suggère le président du Consortium Formation Énergie (CFE), Pierre Leblanc, directeur général du Cégep de Drummondville.

D’abord, la Vallée de la transition énergétique

« En 2022, les régions de la Mauricie et du Centre-du-Québec sont pressenties pour devenir une nouvelle zone d’innovation Québec. Sherbrooke était déjà une zone d’innovation quantique et Bromont, de transformation numérique.  Les villes de Shawinigan, Trois-Rivières et Bécancour sont identifiées par le gouvernement pour cette nouvelle zone de transition énergétique », explique monsieur Leblanc.

La Vallée de la transition énergétique, la VTE, entend dynamiser le secteur industriel, l’innovation et la recherche en lien avec cette transformation. Sa création a été annoncée par le gouvernement le 2 juillet 2023.

Parallèlement, le Consortium Formation Énergie MCQ

Pendant que cette zone d’innovation se développe, un autre projet prend forme. Monsieur Leblanc reprend ainsi le fil de l’histoire : « Nous sommes donc fin 2022,  début 2023.  L’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) et les cégeps de Victoriaville, de Drummondville, de Trois-Rivières et de Shawinigan entament des discussions.  Les échanges visent à structurer les formations en lien avec les industries de la batterie,  de la décarbonation et de l’hydrogène.  Nous nous sommes dit : pourquoi ne pas travailler en concertation plutôt que de se faire compétition ? Tentons de créer une approche collaborative et intégrée plutôt que de cogner chacun de notre côté aux portes de chacune des entreprises.  »

Cette volonté de collaborer afin d’offrir le meilleur service possible en matière de formation est à l’origine du Consortium Formation Énergie MCQ (Mauricie Centre-du-Québec). Pendant plus d’un an, les quatre cégeps, les cinq centres de services scolaires et l’UQTR ont travaillé ensemble.  « Avec le soutien d’Investissement Québec et de la Ville de Bécancour, des enquêtes ont été réalisées. Les entreprises ont été rencontrées »,  mentionne monsieur Leblanc.

Un constat s’est alors imposé. Les besoins en matière de formation et de main-d’œuvre sont immenses. Ils requièrent des inédites, qui ne sont pas encore intégrées dans les programmes d’études existants au Québec. En fait, les enjeux sont tels qu’ils dépassent la Mauricie et le Centre-du-Québec. Le Consortium Formation Énergie MCQ devait élargir son champ d’action.

Finalement, le Consortium Formation Énergie

« C’est devenu évident que le Consortium Formation Énergie MCQ devait s’étendre à la grandeur du Québec,  affirme monsieur Leblanc. Ce qui fait en sorte qu’au printemps 2024, nous avons lancé un appel à tous les centres de services scolaires,  aux 48 cégeps et à toutes les universités. Tous ont été invités à se joindre à un consortium national déterminé à fournir des solutions de formation de pointe à travers toute la province.  »

À ce jour, 17 centres de services scolaires, 3 universités, l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) et plus de 19 cégeps et des centres collégiaux de transfert des technologies (CCTT) ont répondu à l’appel.

Des entreprises et partenaires, dont Northvolt,  Ultium CAM,  Nemaska Lithium,  Nouveau Monde Graphite et l’Institut national des mines (INMQ), ont également accepté de joindre leurs expertises aux travaux en cours. Investissement Québec ainsi que les ministères de l’Enseignement supérieur, de l’Éducation, de l’Économie,  de l’Innovation et de l’Énergie,  de l’Emploi et de la Solidarité sociale siègent au Consortium.

« Il est indéniable que le développement rapide de la filière batterie partout au Québec a mis en lumière la nécessité d’une véritable concertation entre les partenaires industriels,  les ministères et les institutions d’enseignement »,  témoignait Christine Duchesneau,  PDG de l’Institut national des mines lors de l’annonce du déploiement national du Consortium,  le 18 juin 2024. 

Les bases du Consortium Formation Énergie sont jetées,  il faut maintenant les consolider.  L’ex-directeur général du Centre de services scolaire des Bois-Francs,  Alain Desruisseaux,  en assure la coordination.  Les premières assemblées et rencontres ont lieu à l’automne 2024 afin de déterminer les modalités de fonctionnement et les modes de gouvernance.

Le Consortium Formation Énergie prend ainsi le relais et se déploie à l’échelle nationale.  Actuellement, 47 organisations y collaborent,  dont une majorité de cégeps.  « Cette évolution vers un consortium national illustre la maturité du réseau à travailler en concertation »,  constate fièrement monsieur Leblanc.

En complément, un guichet unique

La volonté du Consortium Formation Énergie est claire : fédérer les établissements d’enseignement et coordonner les travaux pour répondre aux besoins de la nouvelle industrie. Cette volonté s’incarne dans l’idée d’offrir un guichet de formation unique consacré à la transition énergétique.  « Nous voulons qu’une entreprise puisse communiquer ses besoins à un seul endroit.  Ainsi, chaque demande sera analysée et une offre de formation adaptée sera faite de manière concertée »,  explique monsieur Leblanc.

Cet outil numérique est en développement.  Dans l’attente d’un financement, l’initiative repose principalement sur le bénévolat. Toutefois, l’embauche récente d’une personne à la coordination du projet est de bon augure.

À venir,  l’École de la transition énergétique

Monsieur Leblanc est persuadé qu’il est impératif,  pour que le Québec devienne une puissance mondiale dans le domaine de la batterie, de former adéquatement les personnes.

L’implantation d’une École de la transition énergétique à Bécancour est un exemple de dossier soutenu par le Consortium.  Un plan fonctionnel et technique détaillant le projet a été déposé auprès du ministère de l’Économie,  de l’Innovation et de l’Énergie.  La réponse du gouvernement est attendue pour la fin décembre 2024.  L’école pourrait ouvrir ses portes en 2027.

Selon monsieur Leblanc, le besoin de formation de la main-d’œuvre nécessite vraiment la création d’une école spécialisée dans le domaine : « Une école vue comme un centre d’innovation et de formation. D’ici 2030,  uniquement à Bécancour,  le besoin passe de 2 500 à 3 000 emplois directs.  Les cégeps et les centres de services scolaires offrent déjà des formations,  mais les besoins sont tels qu’ils dépassent nos capacités d’y répondre.  Qui plus est,  il faudra prévoir de la requalification,  du perfectionnement et de la formation sur mesure. »

« Actuellement, la batterie et la cellule sont à l’agenda.  Mais sous peu,  l’hydrogène vert sera beaucoup à l’avant-plan.  Il faut s’y préparer.  Le succès de ce centre dépendra de son agilité et de sa souplesse pour répondre aux besoins », précise monsieur Leblanc.

L’École de la transition énergétique prévoit la mise en place de programmes interordres (AEP, AEC, certificats, etc.).  Dans le cadre d’une approche intégrée,  les entreprises seront présentes au centre d’innovation et de formation,  notamment pour valider certainsprocessus.  Monsieur Leblanc rappelleque la contribution des entreprises est prévue dans le montage financier : « C’est pour cela que nous attendons une réponse définitive du gouvernement en ayant bon espoir qu’elle sera positive.  » 

Le Consortium Formation Énergie se positionne donc comme un acteur clé de la qualification de la main-d’œuvre actuelle et future. Cette remarquable alliance interordres est propice au développement de nouvelles compétences requises par la transition énergétique. Des compétences qui ne sont pas intégrées aux programmes d’études existants.