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Concours philosopher 2024
Quel refuge pour l’humanité ?
Par Mariève Mauger-Lavigne
Bonsoir, je suis ici pour vous présenter comment la question est née, pourquoi nous avons choisi celle-ci et qu’est-ce qu’elle nous évoquait a priori ou ce qu’elle pourrait évoquer.
Cette question est née dans la suitede la précédente, à travers des discussions sur la pensée de Butler qui concernait la vulnérabilité, le deuil, la précarité, le soin et ultimement l’amour.
Avec Butler nous nous demandions ce qui fait une vie et ce qui n’en fait pas une. Nous cherchions à comprendre : quelles sont les vies qui comptent ? Quelles sont les vies qu’on pleure collectivement ? Pour lesquelles aménage-t-on des espaces de deuils ? Quels sont les critères d’une vie vivable ?
Et à l’inverse, vous l’aurez peut-être anticipé : quelles sont les vies qu’on ne pleure pas, celles dont la souffrance ne nous importe pas, quels sont les morts qu’on ne compte pas et à quoi ressemble une vie invivable.
La question est aussi née avec la fermeture du chemin Roxham, les migrants qui décèdent dans la Méditerranée – et pas que – pratiquement chaque jour, les riches qui implosent dans un sous-marin, des œuvres comme les Nageuses, et évidemment, la crise climatique.
À travers tous ces constats relativement lourds, et plusieurs discussions de corridor, la question Quel refuge pour l’humanité? est apparue – dans l’esprit de ma collègue Sophie.
Et nous l’avons choisi pour plusieurs raisons.
D’abord, parce que nous avions envie de réfléchir autant à la démocratie, qu’aux frontières, qu’à l’intelligence artificielle qu’au transhumanisme. Il nous a semblé que cette question englobait tous ces aspects et qu’elle pouvait se répondre à travers les trois cours de philosophie. À ce sujet, vous écouterez bien ce que notre président d’honneur a à dire là-dessus.
Ensuite, parce que bien qu’elle s’appuie sur de lourds constats à propos de notre monde, la question n’implique pas nécessairement un scénario pessimiste. Elle présuppose certes qu’il faudra, ou qu’il faut peut-être déjà, se cacher et se mettre à l’abri. Elle demande certes d’identifier une menace, actuelle, à des menaces potentielles, mais la question peut aussi conduire à imaginer des refuges hospitaliers.
Et c’est justement ce qui nous a décidés à choisir cette question : elle demande un effort d’imagination, de projection, utopique ou dystopique.
L’an dernier on s’est demandé.es quel monde avons-nous envie d’aimer ? Aujourd’hui on se demande quel monde avons-nous envie d’habiter, autant au plan symbolique que matériel.
Quand tout semble s’écrouler, quand tout semble tomber en ruine, se dérégler, qu’est-ce qu’on peut construire pour envisager une ou d’autres manières d’habiter ?
Qu’avons-nous envie de déconstruire ? de reconstruire ? de préserver ?
Et justement, elles ruines avons-nous envie d’habiter ? d’aménager ?
Qu’est-ce que signifie habiter un monde, un refuge hospitalier ?
Et si l’enjeu des réfugiés, des migrants, des sans-papiers, des sans-abris est une porte d’entrée, c’est aussi parce que la question interroge aussi avec qui nous avons envie de faire communauté, de bâtir des maisons, de créer des lieux hospitaliers, des espaces sécuritaires.
Et si la crise écologique traverse cette question, c’est parce qu’elle peut aussi impliquer de réfléchir à qu’est-ce qu’agir humainement, avec humanité ? Qu’est-ce que créer un monde emplit d’humanité ? Qu’est-ce que ça signifie être humain ?
Et si le spectre de Butler hante cette question, c’est parce qu’elle joue sur les frontières poreuses de la vie, de la survie, du vivable de l’invivable, de l’humain et de l’inhumain.
Finalement, pour adresser la question du comment, pour l’instant, on vous propose de réfléchir à la question, idéalement à plusieurs, en petite communauté, et on espère que vous allez vous laisser aller à imaginer toute sorte de mondes.
Merci et bonne soirée !