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Cégep virtuel

Enseigner ou étudier dans le cyberespace

La pédagogie numérique est d’actualité, en classe ou à distance. Apprendre en mode virtuel, en temps réel ou différé, cela se passe dans le cyberespace. Dans cet enchevêtrement d’avancées technologiques, où se loge Cégep virtuel ?

Par Thérèse Lafleur, rédactrice, Portail du réseau collégial

 

Cégep virtuel offre des cours à distance en temps réel (synchrone), selon un horaire fixe et pendant 15 semaines. Il se distingue de Cégep à distance dont le mode asynchrone permet de suivre des cours au moment et au rythme choisi par l’étudiant. Les deux approches sont complémentaires et répondent à des besoins différents. Les étudiants de Cégep virtuel obtiennent leur diplôme d’études collégiales (DEC) de leur collège d’origine. Cégep à distance peut émettre ses propres DEC.

Quant à Campus numérique Québec, c’est la vitrine des offres de formation à distance (FAD) en enseignement supérieur. Cette plateforme Web développée par le ministère de l’Enseignement supérieur (MES) soutient aussi le développement de l’expertise en formation à distance.

91 % de réussite

Depuis 2017, 14 103 étudiants ont combiné des cours de Cégep virtuel à leurs cours dans leur collège. Leur taux de réussite de 91 % impressionne. Ces étudiants proviennent de collèges partenaires (52 %) ou d’autres établissements (48 %), privés ou publics. C’est leur aide pédagogique individuel (API) qui les inscrit aux cours en commandite offerts par Cégep virtuel.

Arrivée en poste en 2019, la directrice générale, Josée Leblanc, a vite perçu le potentiel de la formule. « Cégep virtuel a pris son envol en 2017, à l’initiative de quelques cégeps en région. Cégep virtuel compte maintenant 17 collèges partenaires. Notre ambition est que tous les collèges, publics et privés, deviennent des partenaires. Cégep virtuel s’adresse aux étudiants qui ont besoin d’un parcours plus agile pour obtenir un DEC. Notre modèle de formation à distance est “synchrone”. Par exemple, l’étudiant se connecte à 18 h. Il suit son cours en temps réel et selon un horaire fixe. Son professeur enseigne dans un collège partenaire de Cégep virtuel. Ce prof peut donner son cours le matin en présentiel dans son collège. L’après-midi, il peut enseigner à distance à des étudiants de partout au Québec. »

Josée Leblanc, directrice générale, Cégep virtuel

Au départ, la création de Cégep virtuel reposait sur le besoin de petits cégeps de ne pas retarder le parcours des étudiants. Par exemple, si un étudiant échouait, il pouvait attendre une année avant que le cours soit de nouveau offert. En se regroupant, ces cégeps pouvaient offrir des cours à distance, synchrones, à ces étudiants pour qu’ils terminent leur DEC. En 2024-2025, 186 cours différents seront donnés via Cégep virtuel.

Le modèle de Cégep virtuel facilite la vie aux étudiants anxieux, ayant besoin de services adaptés ou devant concilier les études avec le sport, le travail ou la famille. De plus, ces étudiants acquièrent des compétences numériques qui leur seront utiles en emploi. Et ce n’est pas plus facile à distance qu’en classe; c’est le même professeur qui enseigne la même matière dans son cours.

Des expériences parlantes

Mélanie Bérubé, professeure et coordonnatrice, département de mathématiques. Membre du Centre d’aide à la réussite (CAR), Cégep de La Pocatière

« Cette pratique a un impact positif pour mes cours en présentiel, qui se voient eux aussi enrichis d’activités pédagogiques innovantes. Je planifie une rencontre individuelle pour comprendre la réalité de chaque étudiant et m’assurer qu’il a tous les outils en main pour naviguer dans l’univers numérique du cours. Les étudiants doivent sentir que je les soutiens dans leurs apprentissages, que je serai présente et facilement accessible. Il est très agréable de côtoyer une clientèle variée et motivée par des objectifs diversifiés. Il faut aussi souligner l’apport de deux alliés précieux : le technopédagogue, dont l’expertise est rassurante, et l’équipe des services informatiques, qui offre un solide soutien technique. »



Yichi Zhang, étudiant, Techniques d’éducation spécialisée, Cégep de La Pocatière

« J’ai choisi le Cégep virtuel, car mon cours était un prérequis pour le baccalauréat en psychologie, et il ne s’inscrivait pas dans mon horaire. Je souhaitais également développer mon autonomie et ma discipline. À présent, j’ai réussi mon cours prérequis, ce qui a considérablement allégé mon parcours scolaire. Les débuts n’ont pas été aisés : il s’agissait de ma première expérience d’apprentissage autonome, ce qui constituait un terrain nouveau et légèrement anxiogène pour moi. Toutefois, la structure du cours s’est révélée solide, et mon enseignant s’est montré disponible. Je suis désormais convaincu de ma capacité à être autonome, et je suis confiant dans la réalisation de mon ambition. »



Stéphane Lacroix, B.Sc.Ed., M.Ed., doctorant en psychopédagogie, chargé de cours et professionnel, Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, professeur d’anglais, Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue
« J’adore varier mes enseignements et le fait d’enseigner en ligne m’oblige à me renouveler. Le tout a aussi un impact sur mon enseignement en présentiel. Éventuellement, je crois en l’enseignement au collégial via une approche hybride (en ligne et en présentiel). L’expérience fut toujours positive même s’il y a eu de petits obstacles par moments. Plusieurs ont eu de la difficulté à s’adapter avec l’imposition du mode en ligne pendant la COVID, mais on voit maintenant que les bienfaits sont innombrables. Je ne retire que du positif de l’enseignement en ligne. »


Abdelhamid Amghar, professeur de physique, cégep Beauce-Appalaches
« J’avais de l’appréhension et, en même temps, de l’enthousiasme avant de commencer à enseigner en ligne pour Cégep virtuel. Cette expérience m’a permis d’appliquer des stratégies d’enseignement différentes de celles d’un cours en présence. J’ai réussi à faire travailler les étudiants en équipe malgré le fait qu’ils venaient de différents établissements. Le volet qui m’a le plus plu, c’est de pouvoir réaliser des expérimentations à distance. Elles ont permis aux étudiants de développer plusieurs habiletés, telles que l’autonomie et l’intégration de nouvelles technologies. Elles me poussent à en développer d’autres, surtout en ce qui concerne les évaluations à distance. »



Pierre-Hugo Berbette, étudiant, Techniques de l’informatique, Cégep de Saint-Félicien
« J’ai suivi des cours avec Cégep virtuel en raison de contraintes d’horaire. Mon parcours scolaire et mon engagement dans un stage final, à temps plein, m’ont contraint à rechercher des solutions pour poursuivre mes études. Suivre des cours avec Cégep virtuel s’est avéré extrêmement bénéfique pour moi. Non seulement cela m’a permis de jongler avec mes obligations professionnelles, mais cela m’a également offert la possibilité de terminer mes études sans avoir à prolonger ma scolarité. Je choisirais encore Cégep virtuel pour sa flexibilité. Cela maximise mon efficacité et me donne la liberté de travailler. »



Caroline Perron, enseignante au Département de psychologie, co-coordonnatrice du programme des sciences humaines, cégep de l’Abitibi-Témiscamingue
« Enseigner au Cégep virtuel a été une expérience très stimulante. Elle m’a permis de développer une approche plus moderne et flexible de mes cours habituels, tout en exploitant les avantages offerts par la technologie. Les plateformes d’enseignement en ligne m’ont permis de suivre de près les progrès de mes étudiants et de leur offrir un soutien personnalisé, selon leurs besoins. Je suis surprise de constater comment les avancées technologiques ont rendu l’apprentissage en ligne non seulement interactif, mais aussi immersif. Une des plus grandes forces de l’enseignement virtuel réside dans sa capacité à connecter des étudiants venant de divers horizons à travers tout le Québec. Cette diversité offre une richesse de perspectives qui dynamise nos discussions et enrichit l’apprentissage. »


Le collégial dans toute sa collégialité

Cégep virtuel évolue sous une gouvernance collaborative. Son comité de gestion regroupe des représentantes des cégeps, de la Fédération des cégeps, de Cégep à distance et du ministère de l’Enseignement supérieur (MES). Cégep virtuel est rattaché au Cégep de La Pocatière.

Quant au financement, il est lié aux commandites de cours et au membrariat des partenaires. Le MES considère Cégep virtuel comme un acteur clé pour la persévérance et la réussite et lui accorde un financement récurrent de 320 000 $ par an. Des ressources ponctuelles s’ajoutent grâce à l’obtention de subventions pour des projets numériques gouvernementaux. Depuis avril 2024, deux professionnelles, Mylène Goulet et Marie-Dominique Duval, ont intégré l’équipe.

« Nous voulons contrer le travail en silos. Travailler ensemble, pour aller plus loin ensemble. Ce sont les collèges partenaires qui lancent les projets, regroupent les équipes et atteignent des résultats intéressants. Cégep virtuel est à leur service », conclut madame Leblanc.