Je vous écris cette lettre parce que l’annonce par le gouvernement fédéral datant du 18 septembre concernant les changements apportés aux permis de travail postdiplôme pour les étudiantes et étudiants internationaux nuira aux communautés, aux entreprises et aux économies locales du Canada. Les changements ciblent, en particulier, les collèges et instituts publics qui sont des fournisseurs clés de personnel qualifié essentiel à l'économie dans des centaines de communautés à travers le Canada.
Ces changements exacerberont les pénuries de main-d’œuvre dans de nombreuses régions et menaceront l’accessibilité des programmes de formation pour les étudiantes et étudiants canadiens.
Il y a deux semaines, le ministre fédéral responsable de l’immigration et de la citoyenneté a dévoilé une série de réformes visant à réduire le nombre de résidentes et résidents temporaires au Canada. Ces réformes comprennent notamment de nouvelles compressions du nombre total d’étudiantes et étudiants internationaux ainsi que des changements dans l’admissibilité à des emplois postdiplôme uniquement pour ceux et celles qui étudient dans les collèges publics.
Soyons clairs : nous sommes favorables à un système d’immigration bien géré. Il est primordial en effet que le programme des étudiantes et étudiants internationaux fonctionne de manière efficace et intègre, et qu’il réponde aux besoins changeants de notre pays.
Pourtant, l’approche malavisée et descendante de ces nouvelles réformes risque de nuire aux communautés canadiennes.
Le gouvernement fédéral veut s’assurer qu’un plus grand nombre de permis de travail seront offerts aux diplômé·es des programmes correspondant aux besoins du marché du travail. Ces permis permettent aux étudiantes et étudiants internationaux de rester au Canada et d’y travailler pendant une période définie après avoir obtenu leur diplôme dans un établissement postsecondaire reconnu. Nous soutenons cette démarche, étant donné que les collèges et instituts publics se disposent de structures solides pour s’assurer que leurs programmes de formation soient bien harmonisés avec les besoins du marché du travail.
Toutefois, en vertu de cette politique, les collèges publics sont tenus de prouver que leurs programmes correspondent bien aux besoins du marché du travail national – besoins déterminés par Ottawa – pour pouvoir être considérés comme des domaines d’études admissibles à un permis de travail postdiplôme. Les nouvelles restrictions d’admissibilité font également une fausse distinction entre la qualité et la pertinence des baccalauréats collégiaux et universitaires approuvés par leurs provinces.
Cette approche descendante ignore les besoins de vos communautés.
La mission principale des collèges et instituts du Canada consiste à répondre aux besoins de leurs communautés, et cela en temps réel. Des chefs d’entreprise locaux siègent à nos conseils d’administration et à nos comités consultatifs de programme. Nos campus sont conçus pour appuyer les objectifs de la collectivité. Les directions de notre réseau visent à améliorer les résultats économiques et le bien-être des personnes qui vivent dans les villes desservies.
La décision d’Ottawa d’harmoniser les programmes aux besoins nationaux crée un décalage fondamental entre les besoins pressants des marchés du travail locaux et les contributions essentielles de diplômé·es internationaux qualifiés issus de plus de 10 000 programmes de diplômes et de baccalauréats dans des domaines très recherchés à l’échelle de notre réseau. Nous en sommes convaincus : il est urgent de remédier à ce décalage.
Il reste encore du temps pour corriger la politique.
Nous pressons le gouvernement fédéral de collaborer avec les établissements, les provinces et territoires pour préparer un cadre où le développement de la main-d’œuvre répond bien aux besoins de vos communautés.
L’ensemble de la population canadienne compte sur les diplômé·es des collèges et instituts.
Les collèges et instituts publics du Canada forment les bâtisseurs, les producteurs, les fabricants, les soignants, les premiers intervenants, les innovateurs et les créateurs d’emplois dont dépendent les Canadiens et Canadiennes.
En obligeant les collèges et instituts à s’en tenir à l’évaluation d’Ottawa quant aux besoins de leurs communautés, ces établissements seront mis au défi pour développer les nouveaux programmes nécessaires à un recrutement local. Ils pourraient également se voir contraints de supprimer des cursus essentiels qui ne sont plus financièrement viables, à la fois pour la population étudiante internationale et la population étudiante canadienne.
Dans un contexte de baisse des investissements publics dans notre système des collèges et instituts publics, une réduction du nombre d’étudiantes et étudiants internationaux rime avec diminution du nombre de programmes destinés à la population étudiante canadienne.
Le plan d’Ottawa illustre une incompréhension fondamentale de la valeur des collèges et instituts publics pour la population canadienne, à un moment où vos communautés font face à des pénuries de main-d’œuvre dans des secteurs critiques, et où les collèges et instituts sont déjà sous-évalués et sous-financés.
Nous vous encourageons à communiquer avec votre collège ou institut local pour découvrir ce que ces changements proposés signifient pour votre communauté. Ensuite, contactez vos député·es locaux pour exprimer vos réflexions sur cette politique et les impacts locaux qu'elle aura.
Cordialement,
Pari Johnston
Présidente-directrice générale
Collèges et instituts Canada
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