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Cégep de Saint-Jérôme
Apprendre dans les rapides des Laurentides le récit de voyage
https://www.ledevoir.com/societe/education/915453/apprendre-rapides-laurentides-recit-voyagePhoto: François Guénette - La majorité des étudiants de la classe Alexis Vaillancourt-Chartrand faisaient du canot pour la première fois, dans le cadre du nouveau cours Expédition littéraire.
Par Catherine Lalonde - Le Devoir
Ils étaient 42 étudiants, samedi 30 août, à partir en canot sur la rivière Rouge, en amont de L’Ascension, dans les Laurentides, pour trois jours et deux nuits. Ils ont canoté en effectuant 10 kilomètres par jour, jusqu’à lundi. Ils ont tenu un journal d’expédition. Ils ont fait des exercices d’écriture, inspirés parfois de Marie-Victorin. Au bord du feu, ils ont écouté leur professeur, harmonica au bec, conter Les marionnettes, de Jos Violon (qui a été repris à l’écrit par Louis Fréchette). Le but ? Réussir leur cours
Expédition littéraire, une nouveauté du cégep de Saint-Jérôme.
Cette sortie « flyée », en plus de prôner un esprit sain dans un corps sain — et dans la nature qui l’entoure —, réunit le cours d’éducation physique Canot-camping et le cours Littérature et imaginaire.
C’est une variation autour du « cours 102 sur la littérature québécoise, de ses origines jusqu’à 1980 », explique Alexis Vaillancourt-Chartrand, professeur depuis 15 ans.
M. Vaillancourt-Chartrand est aussi adepte du canot. Chaque été, avec deux de ses collègues, ils en font une sortie. « Chaque fois qu’on était sur la rivière, il y avait un moment où on se disait “Ah mon Dieu ! Si nos étudiants pouvaient être là !”. »
« S’ils pouvaient vivre ça, ça incarnerait beaucoup plus clairement la littérature, notre littérature, car notre territoire y est tellement présent ! »
Donc, action ; avec l’aval, c’est le cas de le dire, d’une direction particulièrement ouverte. « C’est l’fun à Saint-Jérôme, on a une culture de la nature », dit en souriant M. Vaillancourt-Chartrand. « C’est dans l’ADN de notre cégep, qui a aussi un petit boisé et une classe extérieure. On cherche à s’inscrire dans notre laurentiennité. »
Avec le professeur d’éducation physique Christophe Allen, le projet s’est structuré. Vincent Julien, professeur de littérature et musicien, et le professeur d’éducation physique Olivier Morin Gauthier complètent l’équipe pédagogique, qui « trippe » et ne compte pas ses heures.
Photo: François Guénette Dans les prochaines semaines, chaque élève aura à écrire un récit de voyage, en 1000 ou en 1500 mots.
Entièrement déconnectés
Chaque étudiant a reçu un carnet avant le départ, pour les notes attrapées à la volée ou les exercices.
La majorité des étudiants faisaient là du canot pour la première fois. C’était le cas de Jaffar Dounia, qui avait tâté seulement du kayak et du rafting. « La première journée, ç’a été dur », a-t-il narré au Devoir, au retour. « Surtout garder une ligne droite. On s’est retrouvés souvent dans la berge. »
Au troisième et dernier jour, ils ont fini en passant des rapides R2 : petites vagues, quelques obstacles faciles à éviter, négociation mouvementée pour le canot ouvert.
Et au fil de l’expédition, où les étudiants étaient entièrement déconnectés, ils ont fait des exercices d’écriture, de création, de perception, d’imaginaire.
Des exemples ? « Un de nos ateliers, c’est La dérive sensorielle », explique Alexis Vaillancourt-Chartrand. « On accroche tous les canots ensemble, on ferme les yeux, on se couche dans le bateau, on se laisse dériver… »
« La vue est un sens surutilisé, notamment par les jeunes avec les écrans, mais aussi pour les personnes qui écrivent. Qu’est-ce qui se passe quand on laisse les autres sens prendre le dessus ? Et quand on laisse le courant nous emporter ? »