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L’automne des apprentissages
PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE -
Sarah Kijanja étudie au collège de Rosemont depuis le mois d’août 2023.
En janvier 2022, au camp de réfugiés Nakivale, en Ouganda, Robert Kijanja a vu une annonce dans les locaux d’un organisme – celle du PER, le Programme d’étudiants réfugiés.
Le PER existe depuis 1978. Chaque année, il permet à plus de 150 jeunes réfugiés de poursuivre leurs études supérieures au Canada, dans différents collèges, cégeps et universités. Ils sont accueillis au pays comme résidents permanents.
Robert Kijanja a tout de suite pensé à ses filles.
PHOTO FOURNIE PAR SARAH KIJANJA
Sarah Kijanja, vêtue d’un chandail bleu, entourée de ses quatre sœurs et de ses parents, au camp Nakivale
« Il m’a remis l’annonce, et il m’a dit que c’est une chance », raconte Sarah Kijanja, attablée au café du collège de Rosemont, en octobre 2023. Dans le brouhaha de ce début de session, la jeune femme de 23 ans, toute menue, raconte son histoire d’une voix discrète, le regard fuyant.
Sarah Kijanja et sa famille ont quitté d’urgence la République démocratique du Congo en 2018. Les forces armées pillaient les maisons, violaient les femmes, tuaient des gens, raconte-t-elle. Les coups de feu résonnaient le soir. Ses parents ont statué que c’en était assez, qu’ils devaient fuir Goma. « C’était le pire moment de ma vie », confie-t-elle.
PHOTO TIRÉE DU SITE INTERNET UNHABITAT.ORG
Le camp de réfugiés Nakivale, en Ouganda
Sarah, ses parents et ses quatre sœurs ont abouti en Ouganda, le pays voisin, au camp de réfugiés Nakivale. Plus de 150 000 personnes vivent dans ce camp, le plus ancien d’Afrique, mais à peine 30 % des adultes ont un emploi, selon les Nations unies. Pour subvenir aux besoins de la famille, Sarah a tour à tour vendu du manioc, fait de la mécanique, du maquillage, puis de la couture. Ce qui était le plus payant, c’était de fabriquer des masques en tissu pendant la pandémie avec ses sœurs et sa mère, dit-elle.
Quand Robert Kijanja – qui était professeur d’anglais en RDC – a vu l’annonce du PER, un espoir l’a traversé. Sarah et sa grande sœur Anne-Marie ont passé avec succès le test écrit et ont toutes deux été conviées à l’entrevue à Kampala, la capitale.
En septembre 2022, Sarah a vu apparaître un courriel sur son téléphone, pendant un cours d’anglais. Elle est sortie de la classe, les larmes aux yeux. « Je me suis demandé : est-ce que ma sœur a reçu le message ? » Au retour à la maison, sa sœur lui a annoncé qu’elle avait reçu un message… de refus. « Je n’arrivais pas à lui annoncer que j’avais été prise, raconte Sarah. Mais quand je l’ai dit, elle a été encore plus contente que moi. »
Sarah a fait des recherches en ligne pour voir des images du Canada. Elle ignorait dans quelle ville elle serait envoyée. « Ma prière, c’était de venir à Montréal », confie celle qui a une fois de plus été exaucée.
La famille Kijanja est allée conduire Sarah à l’aéroport de Kampala, au mois d’août, avec l’espoir de pouvoir un jour aller la retrouver au Canada.
PHOTO FOURNIE PAR RAHABI BENAÏCHE
Sarah est accueillie à Montréal par une élève et trois enseignants du collège de Rosemont.