Nouvelles

Projet de loi 96: un exode à craindre?

Article publié par Le Droit - Daniel LeBlanc

Gordon McIvor est le directeur du Cégep Heritage à Gatineau -

Le Droit, Simon Séquin-Bertand

L'adoption du projet de loi 96 - première réforme majeure de la Charte de la langue française depuis 45 ans — est une pilule qui passe mal au Cégep Heritage. Son directeur plaide que les collèges anglophones sont «la mauvaise cible», alors que des bémols surgissent aussi dans les couloirs du Cégep de l'Outaouais. Sans être entièrement sur la même longueur d'onde, les deux institutions s'entendent pour dire que la région pourrait y perdre au change.

La Loi sur la langue officielle et commune du Québec imposera entre autres un plafond en ce qui a trait à la clientèle de chacun des cégeps anglophones de la province, dont le Cégep Heritage, où les places seront limitées à 1175, alors que l'établissement compte cette année 1264 étudiants.

«Il nous faut développer un plan d'action avec le ministère de l'Enseignement supérieur. À date, le MEES n'est pas inclus dans le processus non plus. Il nous a dit que quand ça deviendrait une loi, il nous contacterait pour en parler, donc on attend des nouvelles. Entre-temps, nos profs sont inquiets. En tant que DG, je cherche à minimiser l'impact sur nos étudiants futurs et sur nos profs immédiatement, même si je n'ai pas d'information à leur partager pour le moment», clame le directeur général Gordon McIvor, qui juge insensé que le milieu de l'éducation n'ait pas été consulté.

Ce dernier affirme qu'Heritage, qui est en pleine croissance, mais demeure le plus petit collège anglophone public au Québec, sera contraint à faire du surplace. Disant que personne ne s'oppose à la notion d'améliorer le sort du français, il croit toutefois que le gouvernement Legault doit donner un délai supplémentaire au réseau pour s'ajuster car, il s'agit de changements majeurs et le gouvernail ne peut changer de direction aussi rapidement.

«On va nous plafonner et c'est problématique. Le gouvernement va être strict par rapport au seuil, il y aura des amendes et aussi pas de financement pour les étudiants supplémentaires, mais les étudiants ont jusqu'au 15 septembre pour s'inscrire, alors on ne peut pas savoir exactement à quoi ça ressemblera. On a déjà (en date de mars) 1400 demandes d'admission. On sait que certains vont changer d'idée, c'est toujours comme ça, mais ce n'est pas facile de jongler avec une limite fixée à 1175. Ça cause du stress à tout le monde y compris le personnel. On demande un sursis. Écoutez, uniquement de mettre à jour notre programme de sciences, par exemple, ç'a pris sept ans. Il a fallu consulter les profs, la communauté, le ministère. Imposer de tels changements (loi 96) en deux ans, ce n'est pas faisable», déplore-t-il.
 

« Chaque fois qu'on crée une barrière, que ce soit pour un anglophone, un francophone ou un allophone, le monde trouve une façon de l'éviter parce que le pont est juste là. [...] Le problème du français, c'est surtout un problème montréalais, même si on peut aussi s'améliorer, on est disposé à faire plus. »
— Gordon McIvor, directeur général du Cégep Heritage

Lire la suite