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Relever le défi d’imprimer des batteries


                                                                 Photographies: René Beaulieu, ICI
 

Entrevue avec M. André Dion, directeur général de l’Institut des communications graphiques et de l’imprimabilité (ICI)

Un changement de nom pour refléter une évolution
L’Institut des communications graphiques a annoncé récemment qu’il modifiait le nom du Centre. M. André Dion, directeur général, nous explique le pourquoi de ce changement : « Dans les dernières années, le secteur de l’imprimerie et des communications graphiques a évolué grandement. Certains secteurs d’activités ont connu des temps difficiles. En parallèle, le Centre a reçu de plus en plus de demandes de gens des entreprises qui ont besoin de connaissances liées non pas à l’imprimerie mais à l’imprimabilité. Ces mandats provenaient des secteurs des couvre-planchers, de la tuile, du bois et même de l’alimentaire. Le défi consiste à faire des dépôts de certains substrats sur du carton, du papier ou toutes autres surfaces. Nous possédions ici cette expertise qui n’existe à aucun autre endroit au Canada. Nous avons accepté de plus en plus de mandats dans ce secteur. Nous avons donc décidé de faire évoluer notre nom pour mieux refléter l’évolution de nos champs d’activité en ajoutant  “ de l’imprimabilité ” à notre nom. »

                                                                     Photographies: René Beaulieu, ICI

Une tradition de collaboration étroite avec le secteur industriel
L’Institut est reconnu comme Centre collégial de transfert de technologie depuis 1997. Une situation unique : à l’origine, un investissement de 15 M$, dont 9 M$ accordés par l’industrie et 6 M$ des différents paliers de gouvernement. Un effort significatif de l’industrie du secteur pour se doter d’un institut dans les années 94-95. L’Institut est dirigé par un conseil d’administration dont les membres proviennent principalement de l’industrie. Sur seize personnes, trois  proviennent du collège. L’Institut a un taux d’autofinancement parmi les plus élevés du réseau des CCTT, soit de 80 à 85 %. L’industrie continue d’investir de façon importante en équipements s’assurant ainsi que l’ICI réponde adéquatement à ses besoins.

Un volet information et formation fort développé
En réponse aux besoins spécifiques de l’industrie de comprendre l’évolution technologique (ou les innovations technologiques) et d’avoir une source d’information fertile, le volet information et formation occupe une place importante dans les activités de l’Institut. Celui-ci publie un magazine de grande qualité Québec imprimerie . Il organise aussi de façon régulière des conférences afin que les gestionnaires des entreprises puissent être adéquatement informés des avancées technologiques et de l’évolution du secteur au complet et être ainsi en mesure de s’y préparer. En 2013, L’Institut offre plus de 23 séminaires. Avec une base de plus de 250 clients réguliers, il dessert plusieurs centaines de participants par année. Ce sont des formations de courte durée, entre un et quatre jours,qui n’existent pas ailleurs et qui portent sur des techniques de pointe.

                              Photographies: René Beaulieu, ICI

Un important projet de recherche : la plateforme impressions 2020
M. André Dion nous parle avec enthousiasme d’un important projet de recherche menée par l’ICI. « Le Projet 2020 est financé par le CRSNG et les 28 grandes et petites entreprises qui y participent ainsi que le CNRC, la Banque du Canada et FPInnovations. Les recherches portent sur deux volets. Le premier touche la nanocellulose cristalline, c’est-à-dire faire une encre d’imprimerie à partir de la NCC, qui aurait des caractéristiques uniques au niveau de la couleur et qui permettrait de faire des impressions sécuritaires. Le deuxième volet concerne l’électronique imprimable. D’ici quelques années, plusieurs fonctionnalités pourront s’imprimer. Nous utiliserons les presses d’imprimerie qui ont un coût d’opération très bas pour réaliser des impressions qui transmettront du courant et des informations. Notre premier projet : imprimer une batterie. Nous sommes à mettre au point des produits imprimés capables de communiquer directement avec l’électronique. Ces innovations technologiques sont majeures. Nous entrons dans le monde que l’on appelle “ l’internet des choses ”. À moyen terme, ces recherches modifieront notre façon de consommer de nombreux produits. Les emballages intelligents et les produits imprimés pourront communiquer. Avec le CRNC, nous sommes associés à un grand consortium de recherche qui investira 50 M$ au cours des cinq prochaines années pour aider la recherche au Canada dans ce secteur d’activités. »

L’ICI installera prochainement une nouvelle ligne de presse unique au Canada afin de pouvoir faire du prototypage d’imprimés électroniques. C’est un investissement de 2,3 M$ partagé avec le CRSNG et le CNRC, qui utilisera une partie du temps de la presse. L’installation sera complétée à l’Institut en mars 2014.

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Préparer les étudiants à tous ces changements
Actuellement l’ICI compte 26 employés permanents. Six ou sept professeurs-chercheurs en dégagement du Collège participent également aux travaux. Le Collège Ahuntsic offre à l’enseignement régulier le programme de Technologie de l’impression. La présence de ce programme est importante parce que les nouvelles technologies qui se mettront en place vont requérir un personnel encore mieux formé. Imprimer une fonctionnalité électronique commandera des compétences accrues pour l’opérateur.  « Nous parlons de précision autant au niveau du registre que de la couche de dépôt, qui ont tous deux une influence au niveau du produit final. Si nous pouvons voir le résultat à l’œil avec une image traditionnelle, ce sera une autre réalité avec une fonctionnalité électronique ou une batterie. Nous travaillons étroitement avec le département d’enseignement afin de déjà préparer les étudiants en ce sens. Les étudiants auront accès à cette nouvelle ligne d’impression. Nous sommes aussi à mettre en place avec le collège un programme de stages rémunérés l’été pour les étudiants incluant ceux de Technologie de laboratoire et d’infographie.

» Le Centre fait partie du Réseau TransTech. Ses collaborations se réalisent principalement avec les centres qui ont des missions connexes, on pense ici au Centre en textiles de Saint-Hyacinthe, au Centre de technologie minérale et plasturgie de Thetford pour les matières plastiques ou à Innofibre à Trois-Rivières pour le bois et le carton. »

Imprimer son livre sur demande
Le secteur de l’imprimerie a beaucoup évolué. Il s’est numérisé. Les films traditionnels ont été abandonnés au profit des supports informatiques. Les tirages ont diminué. Les éditions personnalisées ont augmenté au point où chaque exemplaire peut être différent du précédent. Ce qui n’existait pas il y a vingt ans. André Dion décrit ce phénomène : « Avant, personne ne produisait une brochure couleur en cinquante exemplaires, parce que le coût aurait été trop onéreux. Aujourd’hui, c’est fréquent. L’avenir dans l’édition, c’est l’édition à la demande où l’on imprime le nombre de livres dont on a besoin. Ça peut être un livre ou deux, qui auront la même qualité que des livres en librairie. Vous avez des sites comme LULU.com qui se spécialisent dans les albums photo.Ces sites peuvent produire des livres à couverture rigide comparables à une encyclopédie sur le commerce où le client insère ses photos lui-même. On peut composer un livre, le transmettre par courriel à l’imprimeur qui vous enverra le produit final par courrier deux jours plus tard, et ce, pour un coût très bas et inférieur au prix que vous pourriez payer en librairie. »

Les projets de l’Institut
M. Dion nous parle des projets pour l’avenir. « Le projet de l’installation de la nouvelle ligne de presse demeure la priorité du Centre. Elle lui permettra de faire du prototypage d’imprimés électroniques. L’objectif avec le manufacturier de la presse en cours de fabrication est de la faire évoluer au cours des prochaines années. L’objectif est d’atteindre une précision de registre de plus ou moins dix microns. Nous sommes actuellement dans l’industrie plus près de cent microns. Nous devrons ajouter le jet d’encre. De nouvelles technologies de séchage se rajouteront également. Nous développerons une grappe de technologies autour de nos installations. Nous ne sommes pas encore au bout de nos surprises. Une anecdote : récemment, deux jeunes chercheurs m’ont fait la démonstration qu’on pouvait imprimer une lumière! »

Entrevue réalisée par Alain Lallier, éditeur en chef, Portail du réseau collégial, en novembre 2013.






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