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Au cégep, faire naître l’amour du livre au temps des écrans
Pour Amélie Lemieux, présidente de la section Québec de l’Association internationale pour la recherche en didactique du français, priver les jeunes de l’accès aux livres en bibliothèque est une entrave aux découvertes littéraires et, «ultimement, au développement de leurs compétences lectorales». Photo: Unsplash
De nombreux cégeps ont suspendu dans les derniers mois les achats de livres et de documents pour leur bibliothèque. La raison ? L’imposition par Québec de seuils d’investissement surprises, que les cégeps ne peuvent dépasser. Toute la chaîne du livre écope ; et au front, les professeurs et les étudiants, voire la lecture elle-même. Dernier texte d’une série de trois.
Par Catherine Lalonde - Le Devoir
Le lecteur de cégep, aujourd’hui, est une personne hyperconnectée. À l’image de ses professeurs, de sa société. En 2024, alors que la littérature est en compétition avec « l’économie de l’écran », en concurrence avec TikTok, le gouvernement Legault laisse s’effriter le soutien aux bibliothèques collégiales, importantes pour développer l’amour du livre papier et de la lecture, selon les avis des spécialistes récoltés par Le Devoir.
« Le Québec s’est récemment prononcé en faveur d’une austérité ahurissante concernant l’approvisionnement de nouveaux corpus littéraires et de ressources documentaires dans les bibliothèques des cégeps », dit, révoltée, Amélie Lemieux, présidente de la section Québec de l’Association internationale pour la recherche en didactique du français.
Si la tendance se maintient, le fardeau des enseignants sera de plus en plus grand, prédit l’experte. « Les professeurs vont avoir beaucoup plus de pression. Ils vont devoir innover encore pour stimuler l’engagement envers la lecture, pour trouver des moyens de réduire l’écart entre le livre et la vie de tous les jours » de ces jeunes aux écrans superposés.
Cela voulait déjà dire, pour eux, de travailler à revitaliser et à revaloriser le livre papier. « Ce sera de plus en plus difficile d’intéresser ces jeunes à la lecture papier s’ils n’y ont pas accès. »
Car l’accès aux livres est important pour les découvrir, précise Mme Lemieux. Dans une lettre ouverte envoyée au Devoir après son entrevue, elle souligne les résultats « catégoriques » de la plus récente Enquête québécoise sur la découverte des produits culturels et le numérique. « La consultation physique en librairie, en magasin ou en bibliothèque figure au troisième rang (64 %) des moyens utilisés pour découvrir des livres par les personnes internautes de 15 ans et plus au Québec », rappelle le document.