Articles

La boîte à musique Jeune Coop

Récitals pour aînés et tutti quanti

Des résidences pour aînés sont les nouvelles scènes des étudiants en musique du Cégep de Sainte-Foy. Une initiative de La boîte à musique Jeune Coop. Le talent musical de ces étudiants est mis à la portée de la collectivité : animation, improvisation, cours, concerts, tutorat.

Thérèse Lafleur, Portail du réseau collégial

« C’est beau de voir les talents, la jeunesse ! Ça rappelle les moments en famille. » C’est ce que confient les résidents à Valérie Pariseau à la sortie des récitals. Coordonnatrice aux loisirs de la Résidence du Campanile, Mme Bariseau apprécie beaucoup la variété d’instruments proposée. « Les étudiants attirent une trentaine de personnes sur les 130 résidents ; c’est beaucoup. Fredonner ou chanter, peu importe leur perte cognitive, rattache les résidents à des souvenirs. Le lien qui se crée avec les musiciens, c’est de l’or. »

C’est pour combiner engagements et rayonnement que l’équipe de la coopérative La boîte à musique a lancé les récitals pour aînés en résidence. Ainsi les étudiants peuvent pratiquer un répertoire devant public tout en tissant des liens intergénérationnels.

« Après la pandémie, nous sommes allés de l’avant avec les services musicaux dans les résidences. La demande était réelle tant pour le jazz que pour le classique. Cette collaboration est inspirante et nous encourage à poursuivre », souligne Émilie Baillargeon, étudiante responsable du Comité engagement, le « comité gig ». Dans l’univers de la musique, une « gig » est une performance, un engagement musical.

« Je m’implique dans la Jeune Coop depuis trois sessions. J’ai commencé au Comité concert en accueillant les spectateurs et en aidant à la publicité. Ensuite, je suis allée au Comité gig dont je suis maintenant responsable. C’est ce qui m’a amenée à proposer des prestations étudiantes dans une dizaine de résidences. À mon plus grand plaisir, plusieurs ont manifesté leur intérêt. J’ai donc eu à gérer tout ça avec l’aide des autres membres du Comité. J’effectue la communication entre les résidences et la Jeune Coop. Je tiens compte de leurs demandes, de leurs besoins et du type de musique choisi. D’autres membres s’occupent de trouver les étudiants dans notre banque de musiciens sélectionnés et qui disposent d’un répertoire approprié. » La Boîte dispose d’un bottin de plusieurs musiciens sélectionnés jouant de différents instruments et disposant d’un répertoire permettant d’offrir un récital dans un éventail de style musical selon la prestation demandée. « S’ensuit le contrat que je gère aussi. »

La boîte à musique Jeune Coop offre l’opportunité de faire de l’animation musicale rémunérée. Mais l’initiative se veut beaucoup plus ambitieuse.

Ces musiciens peuvent relever des défis d’improvisation, organiser des récitals, donner des cours de musique ou être pairs aidants. En s’impliquant à la Jeune Coop, ils touchent à l’organisation logistique, à la promotion des services et à l’administration. Autant d’expériences acquises pour mener à bien le volet entrepreneurial de leur carrière en musique.

Genèse d’une coop

Amélie Bois, la professeure responsable, explique. « L’initiative vient d’un coordonnateur du Département de musique maintenant Directeur adjoint des études, Benjamin René. Devant les demandes croissantes d’animation musicale, il a vu là un terreau fertile pour créer une coopérative. Un organisme qui permettrait aux jeunes de s’approprier tout ce qu’englobe le métier de musicien. La boîte à musique est née de cette volonté d’associer les jeunes à la gestion tout en structurant de nombreux engagements. »

Pour créer cette entreprise collective, les instigateurs se sont tournés vers l’outil Jeune COOP. Jeune COOP propose une démarche collégiale d’entrepreneuriat coopératif axé sur l’action. C’était l’outil idéal pour soutenir la réalisation du projet de La boîte à musique.

Le modèle a été développé à partir de zéro. Le Bureau de l’international et de l’entrepreneuriat a soutenu la démarche. Le Cégep a contribué financièrement à la fondation de la coop via une fiducie existante au Département de musique. Ainsi la moitié des recettes amassées au fil des années lors des concerts a été investie dans le projet.

Après un an d’efforts et de consultations, les comités ont été identifiés, la régie interne établie et les règlements rédigés. Le développement de cette structure dans un cadre étudiant s’est fait en concertation avec le Département de musique. Et c’est justement parce que cette Jeune Coop évolue dans un cadre étudiant qu’elle se distingue d’une coop légalement constituée. La boîte à musique Jeune Coop a été lancée en 2019.

Le travail en musique

Les étudiants sont au cœur de La boîte à musique, de sa fondation à son lancement. Ils l’administrent et la font vivre. Mais compte tenu des enjeux, cette expérience d’entrepreneuriat demeure encadrée par Amélie Bois. « Depuis le jour un, je suis la prof responsable de cette Jeune Coop. J’ai eu la chance de la voir s’implanter et évoluer. Mon rôle est d’être à la fois un peu partout et en même temps nulle part. Je leur laisse beaucoup de latitude pour qu’ils apprennent par eux-mêmes, mais parfois un certain encadrement est nécessaire. Nous voulons leur offrir une expérience globale du métier de musicien. C’est un réel apprentissage de négocier un contrat en faisant valoir l’importance de rémunérer les musiciens. Trop souvent l’animation musicale est troquée contre un repas par exemple. Un échange qui ne paie ni l’épicerie ni le loyer. Nous voulons les familiariser avec cet aspect. Ils apprennent donc à exiger une juste rémunération ainsi que des conditions de travail acceptables. »

« C’est un réel apprentissage de négocier un contrat en faisant valoir l’importance de rémunérer les musiciens. Trop souvent l’animation musicale est troquée contre un repas par exemple. Un échange qui ne paie ni l’épicerie ni le loyer. Nous voulons les familiariser avec cet aspect. » Amélie Bois

En plus de la gestion des engagements, la Jeune Coop organise les concerts de fin de session des grands ensembles. Un cumul d’expériences essentielles à un parcours professionnel en musique. Les événements organisés par le Comité concert portent l’empreinte des étudiants. Des étudiants qui peuvent compter sur l’expertise des professeurs pour mener à bien leurs mandats.

« L’organisation des concerts suscite une synergie vraiment intéressante », affirme Mme Bois. « Alors que certains gèrent les engagements et d’autres organisent les concerts, une équipe s’occupe des communications. Ces étudiants créent des événements en ligne. Ils conçoivent des affiches pour les concerts. Ils apprennent à alimenter les réseaux sociaux pour mousser La boîte à musique. Autant d’éléments qu’un musicien professionnel doit connaître. »

À la demande des étudiants, deux autres comités ont été créés par la Jeune Coop : le Comité pairs aidants et le Comité rayonnement.

Le Comité pairs aidants s’occupe de tutorat pour les cours de dictée et de solfège. De l’aide par les pairs est déjà structurée en littérature, en mathématique ou en anglais. Comme les musiciens n’arrivent pas au collégial avec le même bagage, certains cours théoriques peuvent être problématiques. C’est pourquoi La boîte à musique offre ce tutorat en dictée et en solfège avec le soutien des professeurs.

Toujours à l’initiative des étudiants, le Comité rayonnement a été mis en place. Tous les cours de musique se donnent à la Faculté de musique de l’Université Laval. C’est pourquoi les étudiants veulent faire connaître leur programme dans les murs du Cégep et hors des murs. Par exemple, ils font de la musique d’ambiance lors d’événements au Cégep ou présentent le programme de Musique dans les écoles secondaires.

Le Comité rayonnement s’occupe aussi des cours individuels d’instruments. Ces cours réservés à la communauté collégiale permettent aux étudiants de s’initier à l’enseignement de leur instrument.

Les étudiants reçoivent un salaire décent pour leurs contrats musicaux. La Jeune Coop se garde un pourcentage minimal consacré à la gestion et au fonctionnement des activités.

Somme toute, la gestion de la Jeune Coop se fait de façon plutôt fluide. Les comités fonctionnent bien. Tous les étudiants en musique sont membres de La boîte à musique. À l’inscription, ils paient une part sociale de 5 $ qu’ils peuvent récupérer à la fin de leurs études. Dès qu’ils s’impliquent, leurs heures de bénévolat sont comptabilisées. À la fin de l’année, ils reçoivent une ristourne sous forme de cartes-cadeaux dans des magasins de musique partenaires. Les étudiants reçoivent un salaire décent pour leurs contrats musicaux. La Jeune Coop se garde un pourcentage minimal consacré à la gestion et au fonctionnement des activités.

« C’est super enrichissant de s’impliquer à La boîte à musique, de le faire pour nos collègues. Ce n’est jamais une compétition. Voir nos amis évoluer avec leur instrument personnel, c’est la meilleure façon de s’entraider », conclut Émilie Baillargeon.