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44e édition de Cégeps en spectacle

Électrisante

Il y avait une atmosphère de retrouvailles le soir de la finale nationale de Cégeps en spectacle, au Cégep de Lanaudière à Terrebonne. En cette année post-pandémique, le spectacle de clôture du plus grand concours des arts de la scène du milieu collégial a été l’occasion de célébrer en grand.

Élise Prioleau, Portail du réseau collégial

La joie de se retrouver autour de la musique, de la danse, de l’humour et de la poésie était contagieuse le 29 avril dernier au Théâtre du Vieux-Terrebonne. « C’est électrique! », s’est exclamé le maître de cérémonie, le chanteur et comédien Dominic Saint-Laurent. La finale nationale a été ponctuée par les sketchs à saveur historique présentés par des étudiants du Cégep de Lanaudière à Terrebonne. Une soirée rythmée par les performances des finalistes. Provenant des quatre coins du Québec, ils ont impressionné par la maturité de leur style, déjà assumé.

Fait nouveau cette année, le Réseau intercollégial des activités socioculturelles du Québec (RIASQ), l’organisme qui chapeaute le concours, a intégré dans ses règlements la possibilité de présenter un numéro en langues autochtones. Jusqu’à maintenant, la langue française était la seule permise. Pour l’occasion, l’artiste innu Scott Pien-Picard a été invité à se produire sur scène.

Jérémy Chhor, grand gagnant de la soirée

C’est Jérémy Chhor du Collège Bois-de-Boulogne qui a raflé le 1er prix avec un numéro d’humour sur le thème des préjugés interculturels. « Contrairement à ce que mon apparence pourrait suggérer, je ne suis pas ici pour jouer au piano », a-t-il déclaré dès le début de son numéro, suggérant qu’il n’a pas le physique attendu d’un humoriste. Dans son numéro, il n’hésite pas à dévoiler certaines facettes moins lisses de sa vie personnelle, de sa vie de famille et sur ses origines cambodgiennes. Une approche efficace, qui surprend et qui fait rire. Le jury lui a remis le 1er prix pour son authenticité ainsi que pour son propos franc et direct.

« J’ai créé un numéro cohérent à partir de différentes expériences que j’ai vécues, qui ont fait qui je suis, comme les crèmes d’acné, Noël en famille et les préjugés culturels. Pour moi, l’humour c’est un exercice dans lequel on peut se donner le privilège d’explorer la partie moins glorieuse de notre personnalité. Je pense qu’il y a aussi de la beauté dans notre imperfection », nous raconte Jérémy Chhor en entrevue.

« Pour moi, l’humour c’est un exercice dans lequel on peut se donner le privilège d’explorer la partie moins glorieuse de notre personnalité. Je pense qu’il y a aussi de la beauté dans notre imperfection. » Jérémy Chhor

Le jeune humoriste, qui a commencé à écrire pendant la pandémie, se produit également dans des bars et des cafés-théâtres à Montréal. Il considère qu’au-delà du spectacle, Cégeps en spectacle a été une expérience formatrice. « Les gens voient souvent la partie spectacle. Il y a aussi la partie formation que j’ai appréciée. J’ai participé à un atelier de présence sur scène qui m’a amené à sortir de ma zone de confort. Je devais mimer des émotions sans parler. C’était un exercice inconfortable, mais qui m’a permis d’apprendre. »

2e prix pour la danseuse Sophia Nadeau

Sophia Nadeau, du Cégep Gérald-Godin, s’est mérité le second prix grâce à une chorégraphie de danse impressionnante par sa fougue, sa technique et sa maturité. Danseuse depuis l’âge de deux ans et demi, elle projetait de devenir ingénieure. Cégeps en spectacle pourrait bien avoir changé sa trajectoire. « J’envisage maintenant de faire de la danse mon métier », nous confie-t-elle en entrevue.

Pour Sophia Nadeau, Cégeps en spectacle a été une expérience marquante sur le plan humain. « Je suis une nageuse de compétition, donc je suis habituée à compétitionner. À Cégeps en spectacle, ça a été une expérience très positive sur le plan humain. À la fin, les autres artistes étaient tous mes amis. Ça a été de belles rencontres », explique-t-elle.

De belles rencontres aussi avec les formatrices de Cégeps en spectacle, qui l’ont aiguillée quelques jours avant la finale. « Quand je dansais, j’avais de la difficulté à faire ressortir mes émotions et mes intentions. À la finale nationale, ça a changé. J’aimerais remercier Sylvie Roussel et Nadine Dionne qui étaient mes formatrices. Elles m’ont aidée à sortir de ma zone de confort, et j’ai vraiment bien performé à la finale », reconnaît-elle.

Une école des arts de la scène

Les finalistes de Cégeps en spectacle bénéficient chaque année de trois heures de formation avec des spécialistes des arts de la scène. Cette année, Nadine Dionne (chant), Roby Talbot (musique), Sylvie Roussel (danse) et Maryvonne Cyr (humour) étaient les formateurs invités.

« On débarque quelques jours avant la finale et on travaille avec les étudiants sur leurs numéros. On leur fait des propositions, mais c’est important pour nous qu’ils se sentent à l’aise de les adopter ou non. Parfois, ils vont intégrer très rapidement certains conseils. C’est fascinant de les voir évoluer parfois très rapidement, entre la formation du jeudi et la représentation du samedi », explique Nadine Dionne, responsable de l’équipe de formation de Cégep en spectacle et coach vocal.

Bien plus qu’un concourt, Cégeps en spectacle, c’est surtout une école des arts de la scène, comme le sont le Festival de la chanson de Granby ou le Festival en chanson de Petite-Vallée. On y apprend à créer, mais aussi à se produire sur scène.

« Être sur scène, ce n’est pas évident. Parfois, certains ont reçu une formation essentiellement technique, par exemple en musique ou en danse. Nous leur amenons des techniques de scène plus globales, comme la présence sur scène et le contact avec le public. Ce sont des connaissances auxquelles on n’a pas souvent accès », explique Nadine Dionne.

La formatrice souligne l’importance de Cégeps en spectacle pour les cégépiens, qui sont dans une période de leur vie où on se révèle à soi-même. « Je suis moi-même passée par Cégeps en spectacle en tant que participante, et je m’en souviens encore. C’est une expérience de vie qui est déterminante pour plusieurs. Pour certains, Cégeps en spectacle est une expérience révélatrice d’une passion et d’une vocation », souligne-t-elle.

Les citoyens culturels de demain

Depuis plus de 40 ans, Cégeps en spectacle a été déterminant dans la carrière de nombreux artistes québécois tels que Martine St-Clair, Sylvain Cossette, Ariane Moffatt, Vincent Vallières, Martin Petit, Philippe Brach et plusieurs autres. À travers les dix grands événements culturels qu’il organise annuellement, le RIASQ se donne comme mission de valoriser la culture francophone d’ici.

« Dans le cadre des activités socioculturelles organisées dans les cégeps, les étudiants font des apprentissages humains, artistiques et citoyens qui les suivront toute leur vie. À travers ces expériences, on souhaite que les étudiants développent leur citoyenneté culturelle, qu’ils développent un art, une curiosité culturelle et un intérêt pour la culture québécoise », conclut Maxime Burgoyne-Chartrand, directeur général du RIASQ.

Cette année, le jury était composé de la journaliste et animatrice Catherine Pépin, du scénariste, metteur en scène et comédien Dave Jenniss, du producteur Martin Leclerc, de l’auteure-compositrice-interprète Thaïs et du chorégraphe et danseur Andy Michel. L’entièreté du spectacle est disponible sur le site Web MAtv.