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Synchronex, le grand réseau d’innovation du réseau collégial

Par Alain Lallier

Marie Gagné est présidente-directrice générale de Synchronex, le réseau des Centres collégiaux de transfert de technologies et de pratiques sociales (CCTT) qui compte maintenant 59 membres. Elle nous présente le rôle stratégique des centres pour le développement socioéconomique du Québec.

Le rôle de Synchronex
Pour Mme Gagné, le rôle de Synchronex consiste à maximiser l’impact des CCTT dans le développement socioéconomique du Québec. « Le réseau des CCTT est unique et envié par le reste du Canada, explique-t-elle. Comment peut-on en tirer le maximum de bénéfices pour l’ensemble de la société québécoise ? Voilà l’optique dans laquelle travaille notre organisme. Quand le réseau a débuté, c’était simplement une association des directeurs généraux qui se rencontraient une ou deux fois l’an pour échanger sur des pratiques administratives et rencontrer les représentants des gouvernements pour mieux comprendre les exigences liées à la reddition de comptes. L’objectif était de développer une vision commune de ce qu’était un CCTT. Avec le temps, le rôle du regroupement a changé. Maintenant, il consiste à aider les centres à se développer et veiller à leurs intérêts. Pris collectivement, ils détiennent une gamme impressionnante d’expertises qui se recoupent dans les projets.Il faut favoriser cette mixité-là, tisser des liens entre les directeurs généraux, entre les équipes et avec le gouvernement pour que les CCTT aient de l’espace dans l’écosystème de l’innovation, ce qui maximisera leur impact. »

L'équipe de Synchronex: Stéphanie Doyon, chargée de projet aux communications et aux médias sociaux (en congé de maternité), Christine Bernier, coordonnatrice aux opérations, Marie Gagné, présidente-directrice générale, Grégory Hersant, coordonnateur au soutien à la recherche, Amélie Légaré, chargée de projet aux médias sociaux, Dominique Bernier, chargée de projet aux communications, Valérie Gagnon, adjointe aux opérations et aux événements, José-Karl Noiseux, chargé de projet spécialisé en économie.

Les escouades
Les escouades sont nées du besoin des CCTT de travailler collectivement sur des enjeux qui rejoignent plus d’un centre, comme l’énergie, le numérique, l’agriculture technologique ou les ressources forestières. « Les CCTT ont une taille somme toute restreinte qui leur donne une grande agilité et une capacité d’intervention unique. En se mettant à plusieurs pour travailler de façon collaborative sur des enjeux pluridisciplinaires stratégiques pour le Québec, chacun a donc une grande valeur ajoutée ancrée dans l’expertise de pointe dans son domaine », ajoute la PDG.

Valoriser la formation technique
Lors de la création du réseau des centres spécialisés – c’était l’appellation de l’époque – un des objectifs consistait à valoriser la formation technique dans les cégeps. Pour le gouvernement et le réseau des CCTT, cet objectif demeure important : « L’impact sur la formation collégiale, sur la formation technique, sur la formation d’une main-d’œuvre plus innovante, c’est un mandat important pour les CCTT, affirme Marie Gagné. Dans les projets, il y a des étudiantes et des étudiants collégiaux impliqués. Il y a beaucoup d’activités qui se font dans le cadre des cours, ce qui leur permet d’accéder à des laboratoires répondant à des besoins réels, et d’utiliser des équipements et des techniques novatrices qui sortent du cadre des programmes. Aller chercher de la nouveauté, et permettre une mise à jour en fonction des besoins de l’industrie, c’est très important. Les CCTT contribuent aussi à la valorisation du rôle de technicien. »

Le rôle important des techniciens
Dans les centres, ce rôle est extrêmement important, car c’est souvent le technicien qui fait le lien avec les équipes des PME innovantes.« Le technicien est sur le terrain; c’est lui qui fait le transfert et la formation pour que les gens s’approprient les nouveautés qui ont été développées, les nouvelles pratiques ou l’intégration de nouveaux équipements. La notion de transfert est beaucoup portée dans les CCTT par les techniciens qui ont vraiment un rôle stratégique à cet égard. Quand on parle de formation d’une main-d’œuvre hautement qualifiée, les centres sont aussi d’excellents lieux d’accueil pour les étudiants de 2e et 3e cycles universitaires. Les CCTT leur permettent d’avoir une formation bien ancrée dans les besoins des industries.»

Les principaux clients : des PME
Les clients des CCTT sont à 70 % des PME. Cette capacité et cette proximité à travailler avec les PME constituent des éléments distinctifs des centres collégiaux de transfert. Cette contribution se manifeste de plusieurs façons : diversification des produits, intégration de la mécanisation, de la robotisation, etc. Une entreprise qui produisait des balises aériennes a pu augmenter ses parts de marché en travaillant avec un CCTT. D’autres entreprises utilisent les CCTT comme leur centre de recherche de façon quasi permanente. « Pour une PME qui est consciente que l’innovation est vraiment importante et qui en a besoin pour rester au-devant de la parade,il y a beaucoup d’avantages à faire appel à un centre. Par exemple, le CIMEQ (Centre d’innovation en microélectronique du Québec) travaille depuis plusieurs années avec l’entreprise Micro Thermo, un chef de file en gestion de l’énergie (réfrigération, climatisation) dans les grandes surfaces, pour optimiser ses coûts et gérer de façon efficace. Le CCTT agit souvent comme centre de recherche affilié. »

 

En innovation sociale
Les CCTT travaillent aussi avec des entreprises en innovation sociale. Par exemple, un centre a développé un projet avec une compagnie de produits chimiques, où il y avait des enjeux de sécurité. Des barrières psychologiques empêchaient certains gens de travailler avec des personnes issues de l’immigration. Le centre a aidé à favoriser la collaboration et l’esprit d’équipe dans ces milieux plus traditionnels, où la venue de l’immigration était nouvelle. Il y a aussi un lien sociétal des CCTT en pratiques sociales. Pendant la pandémie, un centre en gérontologie a travaillé à l’élaboration d’un guide pour briser l’isolement des aînés, et ce, en leur permettant de s’approprier de nouvelles technologies pour garder contact avec leurs familles.

L’importance de l’ancrage régional du réseau
Pour la PDG du réseau, l’ancrage régional des centres est un point extrêmement important. « Le réseau des cégeps est unique au Canada, car il constitue un ancrage de l’enseignement supérieur dans toutes les régions. C’était vraiment un coup de génie d’intégrer la dimension de soutien aux entreprises et d’appui au tissu économique dans des CCTT intégrés dans les collèges. Partout sur le territoire québécois, on donne accès à une offre de services en innovation aux entreprises en croissance. Si la Gaspésie rayonne de plusieurs façons, entre autres dans le développement et la commercialisation des algues pour l’alimentation et les produits dérivés, c’est grâce à son affiliation avec le centre de recherche Mérinov. On voit la même dynamique dans la région de Trois-Rivières avec ses trois centres, le Centre de métallurgie du Québec, Innofibre et C2T3 en communications. Ces centres aident vraiment la région à se développer et à se positionner dans leurs domaines d’expertise. Dans la mouvance actuelle de l’innovation, les CCTT sont des catalyseurs de développement régional. »

Pour un développement durable
Le réseau des CCTT inscrit ses actions dans une perspective de développement durable. Marie Gagné est affirmative : « Il faut penser en termes de durabilité, et d’une économie plus verte. Il faut faire cette migration-là. Et les CCTT peuvent être des acteurs importants à cet égard. Nous avons tenu, en mars 2021, un événement où nous avons compilé plus de 80 communications d’experts sur le thème du développement durable. Des projets ont été menés par les CCTT, que ce soit pour de nouvelles formules de laques plus écologiques pour l’industrie du meuble, pour le recyclage des bateaux de plaisance, ou encore pour des techniques de pêche plus durables. Dans tous les aspects de la société, des projets interpellent et engagent les citoyens des villes et des régions pour que leur voix participe à développer une société plus durable,et ainsi faire contrepoids au message purement économique. »

Vers une phase 3 des développements des CCTT
Marie Gagné souhaite que l’on s’inspire du modèle allemand des instituts Fraunhofer qui favorisent le transfert et l’intégration du savoir pour le transformer en innovations. Après des réinvestissements importants du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada(CRSNG) sous forme de projets et du gouvernement du Québec, de façon ponctuelle dans les dernières années, il est désormais temps de revoir le dispositif des CCTT. « Si nous voulons devenir des Fraunhofer québécois, il va falloir que ces financements soient pérennisés et récurrents, et ce, au sein d’un modèle qui soutient le développement et la reconnaissance de l’impact des centres de façon collective et individuelle. »

Le rêve de Synchronex
Selon Marie Gagné, le rêve de Synchronex, c’est d’offrir aux CCTT l’occasion de maximiser leur impact. « Avec la pandémie, l’économie a été chamboulée. Il y a de nouvelles occasions d’affaires. Des marchés qui ont changé, qui ont migré. Il y a un besoin accru pour les CCTT et nous pouvons maximiser nos transferts de connaissances. Les entreprises et les organisations en ont besoin. Le Québec en a besoin. Il faut donner aux CCTT la capacité d’aider encore plus le Québec à prospérer. Lors de la crise de 2008, les États-Unis ont décidé d’investir massivement en innovation et on a vu l’impact positif de cette décision rapidement. Nous sommes rendus à un moment où il faut penser comme ça au Québec et réinvestir de façon massive dans le dispositif des CCTT pour arriver à aller plus loin sur le plan socioéconomique », affirme-t-elle en conclusion.


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