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Recherche au collégial

Québec reporte indéfiniment des demandes de financement

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Le ministère de l’Enseignement supérieur explique avoir reporté indéfiniment les demandes de financement « afin de permettre un meilleur arrimage entre les programmes de subvention et l’année financière en cours ».

Des chercheurs au niveau collégial doivent mettre sur pause leurs projets de recherche en raison d’une directive de Québec reportant indéfiniment le dépôt des demandes de subvention de programmes créés il y a des décennies. Ces fonds ont permis d’étudier une variété de méthodes pédagogiques dans le but de favoriser la réussite scolaire.

Léa Carrier La Presse

Créé en 1972, le Programme d’aide à la recherche sur l’enseignement et l’apprentissage (PAREA) finance des projets d’études visant le développement d’approches pédagogiques innovantes dans le réseau collégial.

Les chercheurs avaient jusqu’au 30 janvier pour soumettre une demande de subvention. Or, deux semaines avant la date limite de dépôt, le ministère de l’Enseignement supérieur a annoncé le report indéfini du concours.

« Aucune date n’a été avancée », confirme la directrice générale de l’Association pour la recherche au collégial (ARC), Lynn Lapostolle.

Questionné par La Presse, le Ministère n’a pas été en mesure de donner un horizon pour la nouvelle date de dépôt.

Les chercheurs en seraient informés « dès que possible dans le cadre de l’exercice financier 2025-2026 », a-t-il seulement indiqué.

Dans une lettre envoyée aux directions des cégeps qui débute en soulignant l’apport du réseau collégial à la recherche scientifique, le Ministère explique avoir pris cette décision « afin de permettre un meilleur arrimage entre les programmes de subvention et l’année financière en cours ».

Une façon de jouer avec les mots pour éviter de parler de coupes, dénonce la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec.

« C’est de l’austérité déguisée », critique son vice-président, Yves de Repentigny.

Une utilité pédagogique, plaident les enseignants

Au moins un autre programme de recherche au niveau collégial a connu le même sort. Il s’agit du Programme de recherche et d’expérimentation pédagogiques (PREP), qui s’adresse aux chercheurs dans les collèges privés.

À l’instar du PAREA, il finance des projets de recherche utiles au développement de l’enseignement.

C’est inquiétant. Ce sont deux programmes qui soutiennent la recherche en éducation qui sont importants, nécessaires et qui ont déjà été évalués plusieurs fois.

Lynn Lapostolle, directrice générale de l’Association pour la recherche au collégial

En 2023, 13 équipes de chercheurs ont reçu une subvention gouvernementale par l’entremise du PAREA, dont l’enveloppe est d’environ 4 millions de dollars. Parmi les sujets de recherche sélectionnés :

  • les habitudes de vie des collégiens et la réussite scolaire ;
  • l’étude de pratiques alternatives de notation qui favorisent l’apprentissage ;
  • l’expérience socioscolaire des personnes issues des communautés noires dans les cégeps de Montréal.

De tels travaux de recherche sont précieux, fait valoir Yves de Repentigny.

« Les élèves ne sont plus ce qu’ils étaient il y a 20 ans. [La recherche] permet de trouver quelle approche pédagogique on doit avoir avec eux », estime-t-il.

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Le vice-président, regroupement cégep, de la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN), Yves de Repentigny

Dans un mémoire déposé dans le cadre des consultations prébudgétaires 2025-2026, l’ARC réclamait une augmentation des ressources financières allouées à la recherche collégiale, qui seraient « rares et insuffisantes ».

« En maintenant le statu quo ou en imposant des restrictions budgétaires, le gouvernement place la recherche collégiale dans une situation d’extrême fragilité et, qui plus est, prive l’ensemble de la société d’un apport scientifique et économique non négligeable », mettait en garde l’association.

La recherche en enseignement supérieur perd un organisme

Toujours dans le milieu de la recherche, l’Observatoire sur la réussite en enseignement supérieur (ORES) a annoncé jeudi la fin de ses activités.

Mis sur pied en 2022, l’organisme avait pour mission d’« approfondir la compréhension des enjeux touchant l’accessibilité, la persévérance et la réussite ».

Selon son dernier rapport annuel, l’ORES employait une dizaine de personnes et collaborait avec de nombreux acteurs du milieu de l’enseignement supérieur.

Par courriel, le ministère de l’Enseignement supérieur précise que son entente avec l’organisme devait prendre fin au printemps 2024, mais qu’elle avait été prolongée d’une année.

Il souligne qu’il investit 80 millions par année dans son Plan d’action pour la réussite en enseignement supérieur, et ce, depuis 2021.

« Dans le contexte où d’autres instances s’intéressent au thème de la réussite dans les réseaux, notamment certaines chaires de recherche et les facultés de science de l’éducation dans les universités, il ne nous apparaissait pas optimal de prolonger le financement de l’ORES », indique-t-il.

21 février 2025