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Lettre d'opinion
Lettre d’un professeur inquiet
Dany Lavigne
L’auteur est professeur de philosophie au Cégep de Lanaudière à Terrebonne.
Monsieur le Premier Ministre Legault, j’enseigne la philosophie au collégial avec bonheur depuis plus de 20 ans. L’un de mes principaux objectifs a toujours été de donner le goût de la lecture à mes étudiants. Mes recueils comprennent des penseurs classiques, et un peu plus d’auteurs contemporains. Sans tomber dans le nivellement par le bas, je privilégie des textes qui me semblent accessibles, près des préoccupations des jeunes adultes.
Trouver des lectures qui intéresseront mes groupes est une tâche que je prends au sérieux. Durant mes vacances hivernales et estivales, j’emprunte toujours une cinquantaine d’ouvrages. Je ne les lis pas tous en totalité, bien sûr. Or je passe de nombreuses heures à faire des découvertes passionnantes.
Cette session, comme chaque session, j’ai envoyé une commande de livres à la bibliothèque de mon cégep. Des essais (québécois, pour la moitié d’entre eux) sur divers sujets que j’aborde dans mes cours : l’environnement, l’intelligence artificielle, le féminisme, l’autisme, etc. Par le passé, c’était toujours automatiquement accepté. Mais là, on m’a dit qu’il n’y avait pas de budget pour l’acquisition de nouveaux livres.
La situation est semblable dans l’ensemble des bibliothèques du réseau collégial. Ce n’est là qu’une des conséquences des compressions démesurées que votre gouvernement a imposées aux cégeps.
Je comprends la situation budgétaire difficile. Votre ministre des Finances prévoit un déficit de 11 milliards pour l’année en cours. Puisque vous êtes un partisan des baisses d’impôt à tout prix, même pour les plus riches, il ne vous reste qu’une option afin d’atteindre le déficit zéro : couper dans les dépenses. D’où ce retour à l’austérité que vous n’osez pas nommer ainsi.
Un ministre de l’Éducation avait déclaré jadis que les enfants n’allaient pas mourir si les bibliothèques n’achetaient pas de livres neufs. La Coalition avenir Québec (CAQ), qui était alors dans l’opposition, avait réclamé sa démission. Avec raison.
