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Une nouvelle chaire de recherche en fabrication d’imprimés fonctionnels au Collège Ahuntsic

Par Alain Lallier

Fin août, Le Collège Ahuntsic et son centre collégial de transfert de technologie (CCTT), l’Institut des communications graphiques et de l’imprimabilité (ICI), ont reçu une subvention de 1,7 million de dollars du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) pour la création d’une chaire de recherche en fabrication d’imprimés fonctionnels ainsi que pour l’achat d’équipements.

Crédit photo: René Beaulieu

Nous nous entretenons avec la titulaire de la chaire et directrice de la recherche à l’Institut, Chloé Bois, pour mieux comprendre les tenants et aboutissements de cette annonce.

Le couronnement de plusieurs années de travail
L’octroi de cette chaire de recherche représente pour madame Bois une reconnaissance des résultats de tous les efforts et des résultats des cinq dernières années. « C’est un très, très long marathon. La médaille est très belle à la fin. Mais, j’y vois surtout les efforts persistants de toute l’équipe, le soutien continuel du collège et le soutien des entreprises. C’est un peu la cerise sur le gâteau, mais ça fait longtemps que nous travaillons sur la bonne recette de gâteau », affirme-t-elle d’entrée de jeu.

Des imprimés fonctionnels : de quoi s’agit-il ?
Une chaire de recherche en imprimés fonctionnels ? De quoi s’agit-il ? Chloé Bois nous explique : « Nous travaillons avec des procédés d’impression rotative, soit les mêmes procédés que pour l’impression des étiquettes et emballages. De grosses machines dans lesquelles nous mettons des bobines de papier ou de plastique. L’impression se fait avec différentes encres et avec différentes couleurs. Nous pouvons utiliser jusqu’à plus de 10 encres de couleurs différentes pour faire des emballages. Imaginez maintenant que dans ces grands équipements, au lieu d’y mettre des encres avec des couleurs différentes, nous y mettons des encres dans lesquelles nous avons remplacé les pigments de couleur et mis à la place d’autres types de matériaux. Nous avons toujours une presse d’impression, du papier ou du plastique en bobine, mais nous viendrons imprimer dessus différentes couches avec des encres qui contiendront par exemple des particules de carbone. Au lieu d’avoir un pigment ou un colorant jaune, nous mettons une nanoparticule d’argent, etc. Ce que nous obtiendrons en fin de parcours sera un produit imprimé et flexible composé d’un ensemble de couches d’encre superposées ayant chacune un motif différent. Ces morceaux mis ensemble auront ainsi les mêmes fonctions qu’un circuit électronique sur un support flexible et sur bande en train d’imprimer.  »

Marc Fortin, chef des opérations et vice-président de la Direction des partenariats de recherche du CRSNG qui s’adresse à l’auditoire avec André Dion, Directeur général de l’ICI, Madame la Ministre Joly et Nathalie Vallée, Directrice du Collège Ahuntsic ( Crédit photo: René Beaulieu)

 


Réussir à imprimer des batteries ?
Par exemple, l’Institut est capable de fabriquer des batteries toutes imprimées sur presse rotative. En prenant les composantes traditionnelles des batteries, les chercheurs ont réussi à mettre chacune des composantes dans une encre différente. Ils ont travaillé sur de nouveaux motifs pour que cette batterie soit plate et donc imprimable. « Nous avons réussi à sortir de la presse une batterie qui fonctionne. Nous avons ainsi des batteries de 1,5 ou 3 volts qui ont une capacité et des performances électriques suffisantes pour faire marcher des diodes électroluminescentes, pour illuminer les imprimés ! Mais, nous visons un peu plus loin en allant vers la fabrication systèmes composés de batteries imprimées, d’antennes et de capteurs afin de créer des indicateurs de température ou de durabilité pour la traçabilité et la sécurité des aliments par exemple, mais bien d’autres applications sont possibles », explique madame Bois.

Madame la Ministre Joly et Ngoc-Duc Trinh, Chargé de projets et chercheur en Électrochimie à l’ICI, qui lui explique les fonctionnalités des applications en bobines imprimées sur notre presse industrielle ( Crédit photo: René Beaulieu)


Viser l’industrialisation
La spécificité de l’approche de l’Institut réside dans le développement de toutes ces méthodes dans une perspective d’industrialisation. La stratégie est de partir des procédés qui existent déjà dans l’industrie et de développer de nouvelles encres et méthodes afin de faire des millions et des millions de produits; ce travail de montée en échelle demande vraiment des compétences spécifiques.

Une subvention en trois volets
La subvention totale de 1,7 M du CRSNG conjugue trois subventions. Une subvention principale pour la création de la chaire. Une seconde pour l’achat de petits équipements de laboratoire qui permettent de faire de la caractérisation, et une autre liée au renouvellement de la certification du centre permettant l’accès aux programmes de technologie au niveau fédéral. Le centre essaie de travailler avec exactement les mêmes équipements que ceux présents dans l’industrie. Chloé Bois explique : « La presse d’impression que nous avons pour fabriquer de l’électronique imprimée ou des batteries est un équipement que nous retrouvons chez des imprimeurs à Montréal. C’est notre façon de l’utiliser et les méthodes que nous développons qui sont différentes, entre autres pour développer des imprimés fonctionnels. Pour assurer un transfert technologique plus rapide, nous essayons d’être le plus près possible des équipements de production en industrie. »

Une synergie essentielle avec le milieu industriel
Une des conditions essentielles pour l’obtention d’une telle chaire demeure la synergie avec le secteur industriel. La qualité du partenariat avec les entreprises est importante. « Ce que nous avons démontré, c’est la capacité pour le personnel technique des partenaires industriels de venir sur place afin de participer le plus possible à nos activités. Plus les personnes techniques sont avec nous lors des tests et des productions, plus les transferts technologiques peuvent se réaliser et ils peuvent contribuer à transmettre aussi leurs savoir-faire aux chercheurs. Lors de la demande de chaire, nous avons démontré que nous avions conscience de cette problématique, que nous avions déjà testé certaines solutions et une façon de fonctionner pertinente pour nos entreprises. L’orientation de la chaire répond à certains besoins industriels et nous avons construit notre projet de manière à ce qu’il y ait une contribution des entreprises qui leur soit vraiment utile. »

Les liens entre la chaire et le CCTT (l’Institut)
Chloé Bois agit à la fois comme directrice de la recherche à l’Institut et comme titulaire de la chaire industrielle. La chaire permet d’avoir des leviers plus intéressants pour les partenaires industriels, mais c’est toujours dans le cadre des travaux de recherche de l’Institut graphique. Bien sûr, l’ICI a d’autres activités qui ne sont pas de la recherche, soit de la consultation, de la formation et des services de marketing.

Régent Bernier et Michel Martineau, personnels de l’ICI (et Michel est aussi enseignant au collège Ahuntsic en Techniques d’impression) en train de travailler sur la presse industrielle lors d’une production de batteries (Crédit photo: René Beaulieu)


Des retombées sur les programmes du Collège
Même si la chaire semble assez spécialisée, les procédés et les compétences utilisés conservent tous les éléments de la chaîne graphique telle qu’enseignée au collège. Il y a donc une grande complémentarité entre la recherche et l’enseignement au collège. « Cet été, nous avions deux finissantes du collège qui sont venues travailler chez nous. Nous en avons embauché une, parce que c’est vraiment ce type de compétences dont nous avons besoin. Les produits que nous faisons requièrent cependant des compétences additionnelles. Le plus gros changement réside dans le fait qu’au lieu d’avoir des pigments pour la couleur nous avons des particules qui ont d’autres fonctions; les méthodes de caractérisation sont aussi fortement distinctes, car nous ne mesurons plus l’apparence colorée, mais d’autres choses comme une résistance électrique ou une capacité de batterie », explique Chloé Bois. « Nous avons besoin d’être ouverts à une grande multidisciplinarité. Mais, la recherche a besoin de la base technique des industries graphiques. »

Une complémentarité qui s’impose
En terminant l’entretien, Chloé Bois précise cependant que les limites de la chaire et de la recherche à l’ICI sont claires. « Nous sommes des spécialistes des méthodes de fabrication avancées, de la formulation d’encres et des procédés de la chaîne graphique pour faire de la montée en échelle. Nous faisons ce en quoi nous sommes très bons. Et pour le reste, nous sommes supportés par des spécialistes au niveau collégial comme les autres CCTT ou par les universités de notre réseau stratégique en électronique imprimée verte (GreEN). C’est cette complémentarité qui nous aide à réussir nos projets. »






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