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Bilan du Sommet sur l’enseignement supérieur

Une entrevue avec M. Jean Beauchesne, président-directeur général de la Fédération des cégeps

Quelques semaines après la tenue du Sommet sur l’enseignement supérieur, M. Jean Beauchesne a accepté de dresser avec nous les grandes lignes du bilan de ce sommet.

La Fédération des cégeps a eu à travailler dans un contexte un peu particulier. Le financement et la gestion des universités ainsi que les droits de scolarité étaient bien sûr au cœur de ce sommet. Comment les cégeps ont-ils pu tirer leur épingle du jeu? « Comme je l’ai exprimé sur la place publique après le sommet, ce fut pour nous comme la course du marathonien. Nous n’avons pas été sous les projecteurs. Pour nous, ce qui importait, c’était de faire valoir nos enjeux. Nous avons travaillé de façon informelle auprès des hautes autorités du ministère. Cela nous a permis d’obtenir une réponse positive aux demandes que nous avions placées auprès du ministre et du ministère. Nous avons obtenu une écoute attentive et des résultats probants par rapport à des demandes déposées depuis plusieurs mois, voire plusieurs années. Pensons entre autres à la mise à jour du régime des études collégiales que nous réclamions depuis longtemps », de dire monsieur Beauchesne.  

Un autre résultat important concerne la reconnaissance du rôle des collèges en recherche. Dès le départ, ce dossier recelait un potentiel de litige avec les universités. De nombreux partenaires, dont TransTech, les fédérations syndicales, les fédérations étudiantes, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, la Fédération des chambres de commerce, ont plaidé en faveur de l’importance de la place des cégeps en région et de la recherche dans le réseau collégial. « Il y a eu là une reconnaissance très nette de la part des gens du ministère et des partenaires de la place des cégeps en recherche, ce qui prépare bien la table pour les assises sur la recherche qui auront lieu au mois d’avril »; et la Fédération continuera à jouer un rôle actif dans ce dossier. 

La survie des cégeps en région constituait également une thématique importante pour le réseau. « Le réseau collégial, lors des derniers forums, a accepté certaines pistes pour favoriser une offre de qualité en région. Nous organisons un forum qui se tiendra les 18 et 19 avril à Jonquière où tout le réseau collégial est convié. Il s’agit d’un colloque conjoint avec les fédérations syndicales qui vise à mettre en évidence les principaux enjeux concernant la “survie” des cégeps en région. Il faut trouver des pistes, soit pour un plus vaste recrutement d’étudiants étrangers, l’octroi de bourses pour attirer des jeunes en région ou encore de nouveaux créneaux pour les programmes. » 

La Fédération salue aussi des avancées dans le dossier de la reconnaissance des besoins particuliers des étudiants en situation de handicap. « C’est une reconnaissance de la palette de services que nous avons mise de l’avant. Le sommet a confirmé les pistes que nous avions examinées avec le ministère. Nous avons eu la confirmation d’une injection de cinq millions additionnels aux dix millions existants. Ceci devrait contribuer à améliorer les services aux étudiants avec des besoins particuliers. » 

Dans le cadre du Sommet, le gouvernement a annoncé l’implantation de quatre centres d’expertise de reconnaissance des acquis et des compétences dans le réseau collégial. Pour Jean Beauchesne, « c’est une piste qui émerge des discussions des journées préparatoires et du Sommet. C’est pour nous une bonne nouvelle. Il y a eu un appel de candidatures. Six ou sept cégeps s’étaient montrés intéressés. Le gouvernement a retenu quatre cégeps et octroyé le financement pour développer l’expertise. Nous avons des efforts additionnels à faire en reconnaissance des acquis. Les besoins criants du marché du travail font en sorte que nous devons rehausser les compétences des travailleurs qui sont déjà en milieu de travail. La reconnaissance des acquis constitue une excellente façon de leur donner un coup de pouce et de leur permettre d’aller de l’avant. » 

Quant au mandat sur la « mosaïque » des programmes, confié à monsieur Guy Demers, ex-dg de cégep et ex-directeur général de l’enseignement collégial au ministère, monsieur Beauchesne précise que les travaux doivent être exécutés d’ici juin 2014. En parallèle, la Fédération compte participer aux travaux qui doivent porter sur le financement de la formation continue, le ministère ayant accepté de revisiter les règles actuelles. « Nous pensons que les enveloppes de financement de la formation continue ne doivent plus être gérées du côté des tables interordres (secondaire, collégial et universités). Pour les régions où il y a une seule commission scolaire, un seul cégep et une seule université, cela peut fonctionner. Mais, de façon générale, il est difficile d’obtenir une concertation conduisant à des financements efficaces et cohérents. Il faut donc revoir les règles de financement en faisant évoluer les enveloppes en fonction des clientèles. Le ministère accepte de s’asseoir pour considérer le tout avec nous. » 

Au sortir du Sommet, la Fédération des cégeps se disait « relativement satisfaite » des résultats du Sommet. Cette évaluation tient au fait que les cégeps auraient aimé avoir des engagements plus fermes du gouvernement en regard d’une stabilité financière dans l’allocation des ressources. « Nous demandons depuis plus d’un an une planification du financement des cégeps sur cinq ans. S’il est possible de le faire sur sept ans pour les universités, on ne voit pas pourquoi on ne pourrait pas le faire sur cinq ans pour les collèges. C’est de première importance pour les cégeps. Les travaux de planification, d’exécution et d’évaluation de certains projets ne se font pas dans une seule année. Il faut recevoir le financement à la hauteur des besoins. » 

Au total, Jean Beauchesne estime que ce sommet aura permis aux cégeps de se voir reconnaître une place réelle en enseignement supérieur.

« On nous a ouvert les portes pour une reconnaissance de la recherche. La mise à jour du régime des études devrait permettre de revoir la durée des programmes d’études. Pourquoi les programmes devraient-ils tous avoir une durée de trois ans? En mode enseignement supérieur, nous devons privilégier une plus grande souplesse afin de pouvoir mieux nous adapter aux besoins. Les participants aux forums et au Sommet ont insistésur les besoins d’une collaboration accrue entre les cégeps et les universités. Notre carte de programmes comporte déjà une soixantaine de programmes DEC-BACC. Nous venons de majorer les enveloppes pour appuyer les projets conjoints entre les cégeps et les universités. » 

Un sommet utile, profitable et prometteur
Selon le président-directeur général,le Sommet a été utile, profitable et prometteur. « Des travaux doivent être menés,mais le sommet apporte l’eau au moulin permettant d’aller plus loin. Plusieurs chantiers se négocient en mode ouverture. » 

Jean Beauchesne conclut l’entrevue ainsi : « Un an après le printemps érable, le climat est très différent dans les cégeps. Il y a un mouvement très fort des étudiants pour la poursuite de leur parcours, et ce, malgré une certaine déception par rapport à l’indexation des droits de scolarité. Le ton est donné. Je doute que les situations de l’an dernier se reproduisent à court terme. Dans les collèges perturbés par la grève étudiante, nous croyons qu’à la fin de ce semestre, les calendriers reviendront à une situation normale. Nous avons vécu une crise sans précédent qui laisse ses traces. Il est cependant réconfortant de croire que tout cela est derrière nous. »  

Entrevue réalisée par M. Alain Lallier






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