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Le Centre technologique des résidus industriels en Abitibi-Témiscamingue et l’Institut d’apprentissage industriel du Parana (Brésil) : une collaboration s’amorce

Signature de l'entente de collaboration par les directeurs du CTRI et du SENAI Parana

Le Centre technologique des résidus industriels (CTRI), centre de transfert  de technologies lié au Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue, a pour mission de stimuler l'innovation et le développement technologique en vue de la valorisation des résidus industriels et des ressources sous-utilisées dans les domaines de l’agriculture, de la forêt et des mines. Ses objectifs sont de plusieurs ordres : développer des procédés et des technologies pour valoriser l’utilisation des résidus industriels et des ressources sous-utilisées; assister les entreprises lors de l’implantation de nouvelles technologies; informer le public et mettre en application les résultats des recherches; favoriser le perfectionnement des formateurs.

Ses domaines d’expertise sont multiples, en plus d’être pertinents et passionnants. Dans le domaine de l’agriculture, par exemple : valorisation de la biomasse agricole; méthanisation de fumiers de ferme. Dans le domaine forestier : valorisation de la biomasse forestière; mise en place de plantations énergétiques; caractérisation d'huiles essentielles et mise en valeur des sous-produits; développement de substrats pour la végétation de sites miniers. Dans le domaine minier : fabrication de produits finis à partir des résidus d’une exploitation de minéraux industriels; traitement des effluents miniers. Voilà de quoi séduire des partenaires sur la scène internationale, dont les responsables du SENAI, réseau de formation technique et professionnelle, de l’État du Parana, Brésil.

L’histoire du projet

Le SENAI a pour mission de promouvoir l’éducation technique et professionnelle ainsi que l’innovation et le développement des technologies industrielles. Il a été fondé en 1942 dans le but de soutenir le développement industriel brésilien et de répondre à la demande de main-d’œuvre qualifiée. Le réseau de SENAI compte 809 centres de formation répartis dans tout le pays, 200 laboratoires, 28 domaines industriels et plus de 200 projets d’innovation technologique. Cégep International, devenu la Direction des affaires internationales de la Fédération des cégeps, et le réseau Transtech ont signé une entente de collaboration avec le SENAI Paraná en 2013 afin de développer les liens de collaboration avec les cégeps et leurs centres collégiaux de transfert de technologies (CCTT). Le SENAI Paraná implantera sept centres d’innovation dans différents secteurs et souhaite s’inspirer du modèle québécois des CCTT. Plusieurs missions de représentants du SENAI ont été accueillies au Québec au cours des cinq dernières années, entre autres, pour mieux connaître les CCTT, la formation à distance et l’approche par compétences.

L’État du Parana est l’un des plus riches du Brésil, situé au sud du pays, encastré à l’ouest entre le Paraguay et l'Argentine, et l’Atlantique à l'est. On y retrouve des usines d'automobiles, des industries textiles, papetières et agroalimentaires, des cimenteries, des fabriques de meubles, le bois étant l’une de ses principales ressources. La production est exportée par l'intermédiaire de deux grands ports sur l'Atlantique. L’hydroélectricité y occupe également une place importante.  En 2004, le gouvernement québécois a signé une entente de collaboration avec cet État brésilien; l’un des objectifs poursuivis est de mettre en réseau les expertises scientifiques québécoises et paranaéennes, les centres d’excellence et les regroupements de recherche performants, principalement dans les secteurs prioritaires reconnus par les deux gouvernements, parmi lesquels se trouvent l’éducation et la formation supérieure, les sciences, la technologie et l’innovation.

Une première percée à l’international pour le CTRI

Nous avons eu un entretien avec le directeur général du CTRI, M. Hassine Bouafif, originaire de Tunisie, dont le parcours de formation et de recherche l’a mené jusqu’à Rouyn. Détenteur d’un doctorat en sciences de l’environnement de l’UQAT (2010), d’un doctorat en environnement de l’Institut des sciences et industries du vivant et de l’environnement en France (2009), d’une maîtrise obtenue de son université tunisienne en collaboration avec l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne en Suisse, il se joint à l’équipe du CTRI dès janvier 2011. D’abord, à titre de chargé de projet avant d’être promu en 2012 au titre de coordonnateur du secteur biomasse, un des secteurs importants de recherche au CTRI et comme directeur général en novembre 2013.

On ne peut s’empêcher de lui demander comment il est venu jusqu’ici :

Un pur hasard. Quand j’ai décidé de venir au Canada, je n’ai pas regardé la carte pour choisir Montréal ou Québec. Je suis tombé amoureux de la nature de l’Abitibi, où il n’y a pas que l’hiver! J’ai eu une proposition de mon directeur de recherche qui travaillait en Abitibi et je l’ai suivi ici. Je suis arrivé dans la région en 2005. J’ai fini mon doctorat en 2009 et mon stage de postdoctorat en 2010.

Et comment vous êtes-vous intéressé à ce projet au Parana?

C’est grâce à une invitation de Mme Claire Boulé, directrice du réseau Transtech, évoquant une collaboration avec le Brésil pouvant toucher plusieurs CCTT à travers le Québec ; j’ai immédiatement fait part de mon intérêt pour cette initiative. Au printemps 2014, Cégep International nous a demandé de recevoir un stagiaire brésilien du SENAI qui s’intéressait au fonctionnement des CCTT et qui a passé plus d’un mois parmi nous dans nos laboratoires et installations. Personnellement, j’ai beaucoup apprécié cette expérience. Les CCTT n’existent pas encore au Brésil, mais le SENAI se lance dans cette direction, très inspiré par notre modèle.

Par la suite, vous avez été invité à un séminaire international au Brésil ?

Oui il s’agissait d’un séminaire international sur le traitement des eaux et les technologies environnementales. Si une bonne partie du séminaire portait sur le traitement des eaux domestiques, ils étaient aussi très intéressés à l’aspect industriel. Les lois et la réglementation du Brésil en matière environnementale ne sont pas encore aussi pointues que les nôtres en matière de rejets industriels, alors ils regardent notre expérience et notre contexte québécois et canadien avec beaucoup d’intérêt.

Quatre cents scientifiques et gestionnaires y participaient, une majorité provenant du Brésil, du Parana surtout, mais aussi de l’Allemagne, de la France, de l’Argentine ; il y avait aussi une participation de la Délégation commerciale canadienne, ainsi que des représentants politiques du Brésil.

Comment voyez-vous cette collaboration?

Notre entente de collaboration prévoit la promotion et le développement de projets de transfert de technologie pour la gestion ainsi que la stabilisation et la valorisation des résidus industriels. Elle prévoit l’échange d’expertise et la réalisation de projets de recherche de pointe en commun. Il est intéressant pour nous d’avoir cette première collaboration à l’échelle internationale. La mission principale de notre Centre est le développement régional, mais si on peut l’enrichir par des échanges internationaux dans un processus d’innovation, tant mieux ! J’ai à cœur que l’Abitibi-Témiscamingue soit ouverte à l’international, comme le Québec en général.

J’ai été agréablement surpris par la qualité des structures de recherche au Parana ; on a fait le tour de plusieurs organisations, et à chaque fois on a pu constater leur haut niveau. La collaboration avec eux ne peut être que profitable. Avant ma visite, je croyais que les échanges ne se feraient que dans un sens, que nous leur apporterions beaucoup. Maintenant, je considère que nous avons un partenaire avec qui nous aurons des échanges d’égal à égal, comme si on travaillait avec l’Allemagne ou la France.

Je suis justement aujourd’hui en train de préparer une proposition de recherche en vue d’une demande de subvention avec l’École centrale de Paris, qui collabore avec le Brésil dans un laboratoire international. Nous essayons d’envisager un projet qui pourrait réunir des chercheurs des trois pays.

Le CCTT n’avait jamais été mêlé aux projets internationaux du Cégep. Maintenant, avec le Directeur de la formation continue et des relations internationales, M. Bertrand, qui est d’ailleurs récemment allé au Chili, nous avons convenu de toujours présenter l’expertise du Centre comme une composante du Cégep en recherche appliquée lors des échanges avec des interlocuteurs d’autres pays.

J’ai senti au Brésil que l’expérience des CCTT est ce qui les intéresse le plus, peut-être davantage que l’enseignement et les programmes réguliers. En termes de transfert technologique, ils ont soif de notre expérience.

Au cours des prochaines semaines, nous allons déposer des propositions de recherche conjointement avec nos amis brésiliens. Il est également prévu qu’une délégation du SENAI vienne au Québec au printemps et je souhaite les accueillir chez nous alors que nos nouveaux locaux et notre nouvelle installation, une usine semi-industrielle pour le traitement des résidus avec des équipements à la fine pointe des technologies, seront prêts.

À suivre !

La contribution des Centres collégiaux de transfert technologique au rayonnement international du réseau collégial est certainement appelée à prendre de l’ampleur, au Brésil et ailleurs. Nous aurons sûrement l’occasion de présenter d’autres projets prochainement.






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