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Pour des relations égalitaires et respectueuses

Le Cégep de l’Outaouais a procédé au lancement officiel de l’application web: Promotion des relations égalitaires et respectueuses en février 2014. Cette application a été conçue dans le cadre d’une recherche en innovation sociale: Agir collectivement pour mieux prévenir la violence dans les relations amoureuses. Cette recherche est réalisée par Mmes Claire Beaulieu et Marie Bolduc, toutes deux enseignantes au Cégep de l’Outaouais, en collaboration avec des partenaires du milieu.

Pourquoi développer cet outil?

La violence psychologique est prédominante chez les sujets selon les données relatives à la fréquence et la sévérité des comportements violents dans les relations amoureuses recueillis auprès des étudiantes et étudiants du Cégep de l’Outaouais lors de la première (n=489) et de la deuxième phase de la recherche (n= 356). La prévalence de la violence psychologique est de 72,8 % chez les le sujet et de 73,2 % chez son partenaire. Lorsqu’un sujet émet un grand nombre de comportements qualifiés de violence psychologique mineure, le ou la partenaire a tendance à en faire autant. Il existe une relation linéaire positive forte (r = 0,72) entre la violence psychologique émise et la violence psychologique reçue. La fréquence et la prévalence de chacun des comportements associés à la violence psychologique, selon le CTS2 (Lussier, 2008), ont permis d’identifier le comportement prédominant chez les jeunes, soit insulter.

Une définition de l’insulte

Après une consultation menée auprès des sujets et des partenaires, la définition de l’insulte est : « utiliser des mots qui peuvent dénigrer l’intelligence, l’apparence physique ou les capacités d’un individu (T’es donc bien « twitt »). Dans le but d’amener les sujets à diminuer les insultes, des messages personnalisés (vidéoclips) sont rédigés en collaboration avec les intervenants psychosociaux du Cégep et les responsables des communications de quatre organismes régionaux oeuvrant auprès des personnes émettant ou recevant des comportements violents dans une relation amoureuse (Maison Unies-Vers-Femmes, Centre Mechtilde, CAVAC, Donne-Toi une chance.). La collaboration des étudiantes et des étudiants assure l’adaptation, la production et la réalisation des outils de sensibilisation et des messages personnalisés. Ils participent à la démarche en tant que producteurs et usagers.  Ces étudiants reconnaissent l’ampleur de la violence psychologique dans les relations amoureuses, la banalisation de ce type de violence dans la société actuelle et l’importance d’utiliser les technologies d’information et de communication (T.IC.) pour les rejoindre.

Des messages personnalisés via le Web

En tenant compte des suggestions des usagers, les chercheurs ont choisi de diffuser ces messages personnalisés via le Web, afin de modifier la fréquence et la force de l’intention de l’utilisation des insultes lors des échanges dans une relation amoureuse. Le sujet, après avoir répondu à un court questionnaire sur l’ordinateur, reçoit un message vidéo en fonction des réponses qu’il vient de fournir.  Le programme dure 4 semaines. La durée de chacune des séances est d’environ 5 minutes : le temps de répondre au questionnaire, d’écouter le message vidéo et de lire le message de rétroaction.

Les messages personnalisés et les rétroactions tiennent compte des caractéristiques des sujets  (sexe, style d’attachement) et de la force de leur intention de s’exprimer sans insulte.  Cette prise en compte du style d’attachement des sujets découlent, entre autres, des résultats obtenus lors de relance après 6 mois et 15 mois pour mesurer l’impact des ateliers sur le recours aux ressources d’aide, la prévalence et la fréquence de la violence reçue et émise, les connaissances relatives aux éléments caractéristiques de la chicane et de la violence. Après 15 mois, la fréquence des comportements de violence psychologique émis et celle de ceux reçus varie de façon significative selon le type d’attachement.  Les résultats sont disponibles sur le site de l’AQPC, lors du colloque mai 2013.

L’application Web proposée est basée sur l’intervention ciblée et la théorie du changement planifié (modèle de Fishbein et Ajzen, 2010).
Au début de l’expérimentation, 46,4 % des sujets en couple s’exprimaient sans insulter leur partenaire. À la fin de l’expérimentation, 77,9 % y parviennent. Cette performance se maintient toujours après un mois.

L’intégration des technologies de l’information (T.I.C) du programme Épris sans mépris adaptées aux caractéristiques de chaque individu et l’approche concertée du projet de recherche marquent son côté innovateur tout comme l’implication d’un grand nombre de partenaires issus de divers organismes intervenant dans le domaine de la violence conjugale. 

Une application accessible à tous

Cette application Web, est accessible tant à une personne désireuse d’améliorer son bien-être ou sa relation qu’aux organismes communautaires qui aident des partenaires amoureux, aux services d’aide aux élèves ou aux étudiantes et étudiants à l’adresse http://www.eprissansmepris.org/.

Un membre de l’équipe de recherche, la travailleuse sociale a présenté cette application web, en mai 2014, dans le cadre du colloque du Réseau intercollégial des intervenantes  et intervenants psychosociaux (RIIPS). Dans ce colloque, les participants présentaient des projets d’intervention, de prévention et d’animation qui ont impliqué des collègues de leur service, d’autres services, de l’extérieur du cégep ou qui ont sollicité l'aide de l’entourage de leur client. Le nom de chacun des cégeps du Québec est inscrit dans les champs d’accès sur le site web http://www.eprissansmepris.org/, les intervenantes et les intervenants pourront  proposer aux étudiantes et aux étudiants de s’y inscrire à leur convenance.

L’avantage de l’application Web, c’est sa disponibilité au moment jugé opportun par l’étudiante et l’étudiant.

C’est aussi l’occasion de s’interroger sur la raison d’être des insultes dans une relation amoureuse et de trouver un moyen de les diminuer. Sinon, c’est peut-être le signe que la partenaire ou le partenaire actuel ne convient pas. Alors comment mettre fin à la relation dans le respect? L’ajout de cette rubrique, lors des ateliers de sensibilisation sur la dynamique de la relation amoureuse égalitaire et respectueuse, a été très apprécié des étudiantes et des étudiants.  Comment faire, comment dire et comprendre la différence dans la réaction de l’autre devenaient des outils recherchés.

Le cégep se révèle un partenaire incontournable, dans la prévention de la violence dans les relations amoureuses, non seulement en termes de prévention, mais également de dépistage et d’aiguillage vers les ressources appropriées.

Ce projet s’inscrit dans la mission du Cégep, en conformité avec le projet éducatif où le respect de soi, des autres, l’écoute, la réalisation de soi, le soutien de la persévérance scolaire et de l’obtention d’un diplôme constituent des valeurs institutionnelles primordiales. Il joue tour à tour, un rôle dans la production, le relais et l’utilisation de connaissances. Les retombées du transfert des connaissances démontrent un intérêt pour cet outil de promotion des relations égalitaires et respectueuses de la part des différents milieux de pratique et d’éducation. Les dernières modifications apportées à cet outil de promotion permettront de vérifier ultérieurement si elles engendrent les changements souhaités et, par conséquent, de mieux apprécier les retombées.

De gauche à droite : Claire Beaulieu, enseignante et chercheuse; Kathleen Dufour, Directrice du CAVAC de l'Outaouais,  Laurence Barabé, intervenante à Donne-toi une chance; Marie Bolduc, retraitée et chercheuse; Constance Alain, directrice de l'Antre-Hulloise, Richard Riopel , gestionnaire de la base de données, Mélanie Demers, travailleuse sociale au cégep de l'Outaouais.

Les retombées de ce projet pour l’institution sont d’abord une meilleure coordination entre le personnel du Cégep offrant des services psychosociaux et les organismes partenaires du projet : les maisons d’aide et d’hébergement pour les femmes violentées, CAVAC, Donne-toi une chance. Le lancement régional de l’application Web a suscité de l’intérêt dans certaines commissions scolaires locales. Un projet de collaboration pour aborder la question de l’intimidation est en cours. La démarche retenue pour élaborer l’application Web, tout comme le modèle théorique utilisé, la théorie du changement planifié ont suscité de l’intérêt pour aborder la problématique de l’intimidation en milieu scolaire.






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