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DANS LA CLASSE DE… Patrice Lessard

19 mars 2017  - Article publié par La Presse+ -

Nombreux sont les écrivains qui gagnent leur vie comme professeurs, tant au cégep qu’à l’université. Est-ce que cela a une influence sur leur vie d’auteur ? Comment voient-ils leur travail de prof ? Patrice Lessard nous a accueillis dans son cours de littérature occidentale au cégep Bois-de-Boulogne, dans le nord de Montréal.

Josée Lapointe
La Presse

Dans la classe de Patrice Lessard
Le chemin 

Josée Lapointe
La Presse
Lorsque Patrice Lessard étudiait en littérature à l’Université de Montréal – après avoir fait son cégep en sciences de la nature et une session à Polytechnique ! –, il ne s’est jamais posé la question du « après ». « Je pensais tout bonnement que j’allais devenir écrivain », dit-il, assis dans la cafétéria du cégep Bois-de-Boulogne. Il a commencé à enseigner au cégep de Saint-Hyacinthe en 1998, puis a été embauché à Bois-de-Boulogne l’année suivante. Il n’en est jamais reparti. « C’est un travail, mais idéal pour écrire parce qu’on est assez maître de son horaire. J’ai aussi pu prendre des programmes de traitement différé sur deux ans, qui m’ont permis de me consacrer à l’écriture pendant une session complète, comme l’automne dernier. »

Dans la classe de Patrice Lessard
L’auteur

Josée Lapointe
La Presse
Patrice Lessard a publié son premier recueil de nouvelles, Je suis Sébastien Chevalier, en 2009 aux éditions Rodrigol. Quatre romans ont suivi, tous publiés chez Héliotrope : trois qui forment une jouissive trilogie lisboète, et un roman noir très ludique, Excellence Poulet. Même s’il s’est passé plus de 10 ans entre la fin de l’université et son premier livre publié, il n’a jamais été du genre « écrivain frustré qui ronge son frein en attendant la gloire ». « Quand j’ai commencé à étudier en littérature, j’avais lu seulement 10 livres qu’on pouvait mettre dans un corpus littéraire, et j’incluais là les trois tomes du Seigneur des anneaux ! J’ai toujours eu conscience d’arriver là-dedans avec beaucoup de retard. Je ne suis pas patient dans la vie, mais là, je me suis dit : “Ça viendra quand ça viendra.” » 

Dans la classe de Patrice Lessard
Le prof

Josée Lapointe
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S’il a appris son métier par essai-erreur, Patrice Lessard maîtrise depuis toujours l’art d’intéresser les élèves. Le fait qu’il soit auteur lui donne une certaine crédibilité dans ses cours de création littéraire – « Ils peuvent vérifier que je suis quand même compétent dans ce que je fais ! » Mais dans ses cours de littérature québécoise ou de littérature occidentale, il préfère garder une saine distance entre ses deux métiers. La plupart de ses élèves, donc, ne connaissent pas son autre vie. Étrangement, ce sont ses 10 ans d’enseignement en théâtre qui lui ont le plus profité comme auteur. « À cause des professionnels avec lesquels je travaillais, des pièces que j’ai lues, de l’apprentissage de la scène et du travail sur le texte. Le caractère oblique de l’expérience théâtrale en a multiplié les bienfaits. »

Dans la classe de Patrice Lessard
Le cours

Josée Lapointe
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Le cours de littérature occidentale a été « monté » expressément par Patrice Lessard dans le cadre du programme Histoire et civilisation. Une douzaine d’élèves y sont inscrits. Le matin de notre passage, on discute de la signification des différents chants dans L’enfer (La divine comédie) de Dante, alors qu’une évaluation s’en vient avant la pause. « Ce n’est vraiment pas un livre qu’on peut lire d’un seul coup », a souligné une étudiante lorsque le professeur leur a demandé ce qu’ils en avaient pensé. Après la pause, on commence à aborder le prochain livre à l’étude, Jacques le fataliste de Diderot. Patrice Lessard s’emballe, fait quelques détours et donne des pistes de lecture. « Il faut jouer le jeu des digressions, sinon on est frustré, et ce n’est pas bon d’être frustré quand on lit. »