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Les fondations de cégeps : pour passer à une vitesse supérieure


Entretien avec monsieur Jean-Guy Paré

Jean-Guy Paré a une longue expérience du réseau collégial. D’abord à titre de professeur d’éducation physique au Cégep de Trois-Rivières pendant 14 ans où il a été en même temps coach de l’équipe de football les Diablos. Après un prêt de service pendant deux ans pour l’organisation des fêtes du 350e anniversaire de la Ville de Trois-Rivières, il accepte un mandat de dix ans à titre de coordonnateur des services de formation aux entreprises des cégeps de Drummondville, de Shawinigan, de Trois-Rivières et de Victoriaville. De 1994 à 2003, il représente le comté de Lotbinière à l’Assemblée nationale. Pendant les sept années suivantes, il va travailler pour les fondations des cégeps de Drummondville, de Victoriaville, de Trois-Rivières et de Shawinigan. Au cours des dernières années, il a travaillé avec la Fondation de l’Université du Québec à Trois-Rivières.

Il a accepté de nous parler de son expérience des fondations du niveau de l’enseignement supérieur et de partager avec nous sa vision sur les stratégies qui permettraient aux fondations des cégeps d’assurer leur croissance et leur pérennité.

« Les fondations de cégeps n’ont pas les ressources suffisantes pour atteindre des objectifs ambitieux »

De son expérience des fondations de cégeps, Jean-Guy Paré dégage le constat suivant : « Les fondations de cégeps n’ont pas les ressources suffisantes pour atteindre des objectifs ambitieux. Quand tu n’as pas une personne à temps plein pour coordonner le tout, tu ne peux aller très loin. Et même si tu as du personnel à temps plein et que les salaires et des bénéfices marginaux doivent être assumés à même les dons reçus, une fondation ne réussit pas à capitaliser et à se dégager une marge de manœuvre. Tu es obligé de faire une ou deux activités qui te rapportent 30 000 $ pour payer une partie du salaire de la personne. Trop d’énergies sont mises pour ces activités alors qu’elles devraient être concentrées à développer la fondation. J’en suis arrivé à la conclusion que, pour avoir une fondation sérieuse et pour assurer la pérennité, il faut un solde de fonds de deux millions de dollars. »
Jean-Guy Paré entrevoit une piste de solution dans l’avenue qui a été empruntée par le réseau des universités du Québec. Elles ont obtenu du gouvernement du Québec des règles budgétaires nommées « Placements Universités » qui favorisent le développement des fondations.

Le programme « Placements Universités »
« Le programme Placements Universités incite les particuliers, les sociétés et les fondations du Québec à donner plus généreusement aux établissements universitaires. Pour ce faire, le Ministère accorde des subventions de contrepartie qui s’ajoutent aux dons et aux contributions recueillis par les organismes auprès de donateurs et de fondations.  »
Le programme compte deux volets : 
Le volet 1 : Subvention de contrepartie. « Pour favoriser les dons financiers des individus et des entreprises aux fonds de dotation et aux fondations universitaires, le Québec verse annuellement à chaque université 0,25 $ pour chaque dollar de dons obtenus en moyenne au cours des cinq années précédentes, jusqu’à concurrence de 1 M$ par établissement. »
Le volet 2 : Développement des fondations. « Le Ministère fixe à chaque université un objectif de croissance des fonds collectés pour chacune des cinq prochaines années. Il invite ainsi les universités à mettre en place des campagnes de financement destinées à faire croître de 8 % chaque année les dons en espèces des individus et des entreprises aux fonds de dotation et aux fondations universitaires à partir de la moyenne des dons effectivement obtenus au cours de la période 2004-2009.

» Le gouvernement s’engage à verser une subvention de contrepartie pour cette tranche annuelle de 8 %. Dans le cas des universités de petite taille, la subvention de contrepartie sera égale à 1 $ pour chaque dollar reçu. Pour les besoins de Placements Universités, seront considérées comme universités de petite taille celles qui ont moins de 15 000 EETP. Les universités de grande taille, soit les universités de 15 000 EETP et plus, recevront une subvention de 0,50 $ pour chaque dollar de don. L’allocation sera versée lorsque l’établissement aura démontré au Ministère la croissance des fonds collectés.

» Lorsqu’elles se prévaudront du deuxième volet du programme, les universités pourront reporter à l’année suivante la partie excédentaire des dons reçus au cours d’une année si l’objectif annuel fixé par le gouvernement est dépassé. Cette disposition permettra notamment de tenir compte des campagnes de financement qui se déroulent sur plusieurs années.1 »

À titre d’exemple, grâce à ces mesures, l’UQTR a reçu 7,8 M$ au cours des sept dernières années permettant à la Fondation de passer de trois à sept personnes à temps plein qui travaillent pour la fondation. Les subventions sont versées à l’université. En 2009, la fondation a amassé 2 M$ annuellement; en 2010 : 3 M$. En 2012, la fondation a recueilli 6 M$, ce qui a permis à l’université de recevoir 2 M$ de subventions du gouvernement (1 $ de subvention pour 1 $ de don) dans le volet 2 des mesures. L’excédent a été reporté sur les années subséquentes.

Il est important de noter que les sommes versées à l’université dans le cadre de ce programme ne peuvent être utilisées que pour les services aux étudiants ou pour soutien administratif à la fondation de l'établissement.

« Je pense qu’il faut obtenir des mesures comparables pour les cégeps pour assurer la pérennité de nos fondations », soutient Jean-Guy Paré.

Profiter du 50e anniversaire des cégeps
Pour lui, le 50e anniversaire de la naissance des cégeps offre une occasion unique. « Pour les cégeps de région, leur fondation, ce n’est pas un outil, c’est un coffre d’outils pour faire du recrutement, pour donner des bourses à l’entrée, pour financer des projets, pour appuyer la recherche… Il faut profiter de l’anniversaire des 50 ans des cégeps pour faire valoir le réseau et attirer des appuis. »

Jean-Guy Paré est conscient de la compétition actuelle entre les fondations pour s’attacher des donateurs. Mais il rappelle que, si traditionnellement c’est la santé qui nolise le plus de dons, de plus en plus l’éducation arrive en deuxième place et tend à se rapprocher de la santé. En témoignent les résultats des dernières campagnes majeures des universités québécoises.

Cibler les très grandes entreprises
Dans les stratégies de développement à cibler, Jean-Guy Paré retient les grandes entreprises du type Microsoft (Fondation Bill-et-Melinda Gates). « Un collège seul ne pourrait être accrédité. Mais, les cégeps regroupés dans une fondation réseau pourraient accéder à ces grands donateurs (Hydro-Québec, Caisse de dépôt et placement, Cisco, etc.). Une fondation des cégeps pourrait ouvrir des portes qui restent actuellement fermées. À titre d’exemple, malgré la présence d’une fondation dans chacune des universités du réseau, l’UQ a mis en place la Fondation de l’Université du Québec qui travaille en complémentarité avec chaque université. »

Profiter de l’immense bassin de nos diplômés
Le 50e anniversaire de la naissance des cégeps offre au réseau et aux fondations l’occasion de mettre à contribution l’immense bassin des diplômés. Jean-Guy Paré est affirmatif et convaincu : « La Fédération des cégeps va aller chercher un ambassadeur dans chacun des collèges. On y retrouvera plusieurs présidents d’entreprises et des personnalités du domaine sportif et culturel. Ça va devenir une force de frappe. Chaque collège aura aussi ses propres ambassadeurs qui sont des personnalités connues. Mais, a-t-on vraiment tiré tout le profit des milliers de diplômés que nous avons formés? Si le gouvernement nous donne accès aux mêmes mesures que celles offertes aux universités, les fondations pourront disposer des ressources pour mettre à contribution ce potentiel inexploité et assurer la pérennité de leur mission. »

1. Gouvernement du Québec, ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Règles budgétaires et calcul des subventions de fonctionnement aux universités du Québec, Année universitaire 2015-2016, juillet 2015.

Entrevue et texte réalisé par Alain Lallier, édimestre et éditeur en chef, Portail du réseau collégial du Québec.






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